Schnellinger, la flemme et moi

Hier, disparaissait à Milan, l’un des plus grands défenseurs de l’histoire. Karl-Heinz Schnellinger, surnommé Volkswagen pour sa fiabilité à toute épreuve. Je ne l’ai pas connu sur un terrain mais j’ai l’impression qu’il a toujours fait parti de ma passion pour ce sport. Il était de toutes les archives. C’est lui qui se jette, comme un mort de faim, pour égaliser face à l’Italie en 1970. Son unique but en sélection, pour 30 minutes supplémentaires qui deviendront légendaires. Il est à Wembley, quatre ans auparavant, aux premières loges pour assister au jour de gloire de Hurst et de l’Angleterre. Un roc défensif, aussi à l’aise sur son côté gauche qu’en défense centrale qui personnifie si bien cette Allemagne qui ne gagnait pas… Alors, plutôt que de piocher pendant des heures dans les textes, que de sortir quelques citations inédites dont mes camarades ont le secret, laissons pour une fois un peu parler la mémoire. Ou du moins, ce qu’il en reste… Car si la période est propice à une intense flemme personnelle, Schnellinger mérite bien quelques lignes. Même incomplètes…

Karl-Heinz évoluait en deuxième division quand il fut convié au Mondial 1958. Jouant les seconds rôles et ne pouvant rien face à la furia de Just Fontaine pour la consolante. Un gamin entre deux mondes. Entre les derniers feux de vie d’Helmuth Rahn et les premiers coups de boules d’Uwe Seeler. Un Seeler, idole de la nation, avec qui il partagea quatre Odyssées, de Malmö à Mexico DF, de Santiago à Londres. Et autant de désillusions… Passé à Cologne, Schnellinger accompagne le vieux Hans Schäfer vers les sommets d’un foot encore amateur et est reconnu comme le meilleur joueur du pays. 1962 est une grande cuvée. Karl-Heinz est sur le podium du Ballon d’Or, chose trop rare pour un défenseur. Mais au contraire des Beckenbauer ou Sammer, il le fut avant tout pour sa première mission. Celle d’annihiler les offensives. Par le placement, la vitesse ou la rudesse. Et le modeste libéro que je fus ne peut qu’être sensible à cela.

L’Italie lui fait les yeux doux. Schnellinger assiste à l’éclosion de Zoff et au déclin d’Angelillo. Mais sans faire offense à Mantoue et à la Roma, c’est dans la ville des Sforza qu’il trouvera des acolytes de son rang. Rivera, Pratti, Sormani. Rosato, son binome. Hamrin, autre étranger tombé fou amoureux de la Botte. Et un coach qui lui fait une confiance aveugle, Nereo Rocco. Rocco et ses fils vont s’affranchir de l’ombre embarrassante du cousin de l’Inter et dominer l’Europe. Ce n’est pas Cruyff, vaincu 4-1 en finale européenne, qui dira le contraire. Par la suite, dans une ligue désormais fermée aux étrangers, Schnellinger sera perçu comme un ovni, une relique du temps passé. Une époque où personne ne comptait ses lire. Karl-Heinz, Haller, Altafini, autant de temoins d’une Serie A triomphante qui traversera la décennie 1970 tel un fantôme.

Comme je le disais au départ, Schnellinger mériterait une trilogie. Il était de la caste des Facchetti, Silvio Marzolini ou Nilton Santos. Un figure indissociable des années 1960, un combattant jusqu’au dernier souffle. Ce texte n’est qu’une mise en bouche. J’ouvre un paquet de cacahuètes, m’installe confortablement et attends désormais que mes compagnons de route daignent compléter ce tableau imparfait…

11 réflexions sur « Schnellinger, la flemme et moi »

  1. Dieu me garde de tes cacahuètes (j’y suis allergique).

    Schnellinger, souvenir de lecture entre deux plongeons dans un lac de sa région (comme ça que j’appris qu’il était originaire d’un gros bourg juste de l’autre côté de la frontière), ben c’est que la presse locale regrettait que lui et sa région n’aient jamais totalement, vraiment fait la paix ; comme s’il resta toujours un peu d’amertume qu’il quittât la RFA pour la Botte..

    J’avais lu qu’il avait été harassé pour cela à l’époque, quasiment un traître.. Ca ne se faisait, ne se concevait même pas apparemment……..et lui, en retour, de ne plus guère remettre les pieds dans son coin de Rhénanie, sinon çà et là pour sa mère..centenaire, je crois??

    Pour le reste, j’ai plutôt une question : Schnellinger, Seeler.. ==> Y eut-il alors un troisième malheureux larron, incontournable mais à jamais circonscrit entre deux sacres mondiaux de sa nation?

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  2. Une question que l’on peut se poser est quel pays a fourni le plus grand nombre d’arrières gauches talentueux. L’Allemagne avec Schnellinger, Breitner, Briegel et Brehme ? Le Brésil avec Nilton Santos, Junior, Branco et Roberto Carlos ? L’Italie avec Fachetti, Cabrini et Maldini ? La France avec Bossis, Lizarazu et bien sûr Paul Marchioni ?

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    1. Pour l’Europe je dirais l’Allemagne sans trop hésiter, tant à gauche ils sortirent encore d’autres bien beaux bébés – pas le même niveau, certes, encore bien..mais tout de même : les Berthold, Ziege, Lahm à ses débuts je m’en rappelle à babord aussi.. En flux continu, ou quasiment.. Qui fait aussi bien?

      L’Italie, depuis Maldini, bof?? Amoros pouvait jouer à gauche……..mais joua le plus souvent à droite, c’est bien ça, non?

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  3. Tu évoques brièvement son passage à la Roma et tu fais bien : rien à en dire, il a dû se demander où il était tombé.
    Un club fauché, ce fada de Toto Lorenzo comme coach, des joueurs n’ayant plus rien à offrir comme Manfredoni, Nicolè, Angelillo… une seule saison fort heureusement.

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      1. J’ai une préférence pour l’équipe de 63 même si le parcours de 69 est plus impressionnant (Celtic, Man U, Ajax). Mais le milieu de 63 avec le Trap, Sani et Rivera, ça avait de la gueule. Et cette équipe aurait dû battre Santos sans les traquenards du Maracanã dont on a parlé ici-même dans la série sur la Coupe Intercontinentale.

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  4. C’est l’Angleterre-RFA 70, la photo mise en avant?

    J’adore regarder les pubs……….. Il y a là quelque chose de prophétique, à l’oeuvre, l’on distingue qui déjà entreprenait de prendre la main sur le barnum..et en même temps c’est illustratif d’un temps déjà ancien (Jägermeister seraient-ils encore en mesure de louer ce genre d’emplacements, pour ce genre de rencontre??)

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    1. Perso, me demande quel était le prix des places pour les Mondiaux à l’époque. Ça dépendait évidemment du pays et c’est difficilement transposable mais…
      Je sais que Bison a eu la chance d’assister à la finale RFA-Italie en 82…

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      1. Oui, mais j’étais invité (et j’avais 13 ans). Aucune idée du prix, donc.

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