Léopards 1974 : Rumble in Germany

« Le chemin le plus court pour aller d’un endroit à un autre n’est pas la ligne droite, mais le rêve. »

Proverbe africain

Le 24 novembre 1965, au Congo-Kinshasa, le général Mobutu s’emparait du pouvoir avec l’aide des services secrets américains. Rapidement, il installa une politique de prestige qui reposait, notamment, sur un volet sportif.

Joseph-Désiré Mobutu.

« Zaïrianisation » et « authenticité »

En Afrique, peut-être plus qu’ailleurs, le sport, et particulièrement le football, permet d’unir et de fédérer la nation le temps d’un match, d’une partie ou d’un combat. Cette dimension mystique offrit au Mouvement populaire de la révolution (MPR), le parti-Etat fondé en 1967, un des fondements de sa politique d’unification des ethnies autour de la personne de Mobutu. Pays multi-ethnique par définition, le Zaïre (rebaptisé ainsi en 1971) voulait s’imaginer comme une seule communauté, une seule nation.

Dans l’économie, comme dans le sport ou dans la société en général, l’heure était en effet à la « zaïrianisation » et à « l’authenticité », mêlant retour aux traditions africaines (à l’opposé des créations de l’époque coloniale), défense des pays du Sud et modernité.

Comme nombre de régimes autoritaires avant lui, le nouveau pouvoir congolais souhaitait se valoriser à l’échelle mondiale par une politique sportive volontariste. C’est ainsi que Mobutu promut un haut commissariat à la Jeunesse et aux Sports, et organisa les Jeux congolais (puis zaïrois) qui réunissaient tous les deux ans les meilleurs athlètes du pays.

Sur la scène internationale, le pouvoir congolais envisageait de rivaliser avec les meilleures équipes du continent. En janvier 1966, comme un symbole, le onze congolais affronta les Black Stars du Ghana, doubles champions d’Afrique (1963 et 1965). Mais, plus encore, le Ghana était la patrie de Nkrumah, le leader des non-alignés et le partisan du panafricanisme, celui à qui Mobutu rêvait de ravir le rôle dans l’arène diplomatique mondiale. Les Congolais subirent un cinglant revers 3 buts à 0.

Dès lors, le régime rappela les meilleurs joueurs expatriés, souvent en Belgique (l’ex-métropole). Si certains s’exécutèrent volontairement, d’autres furent véritablement séquestrés. Appelés en sélection nationale, il leur était ensuite impossible de quitter le pays. A partir de 1966 également, les transferts des joueurs devinrent une affaire d’Etat. Pour quitter un club, les joueurs devaient obtenir une autorisation du haut commissariat à la Jeunesse et aux Sports, ce qui interdisait toute expatriation non désirée par le gouvernement.

Les résultats ne se firent pas attendre. Dès 1968, l’équipe nationale remporta la CAN en Ethiopie et le TP Englebert la Coupe des champions africains.

Nouvelle vitrine des pays du Sud et pseudo-grande puissance, le Zaïre s’invita à la table des Grands. Mobutu se déplaça aux Etats-Unis en 1970, en Chine en 1973. Il fit un discours devant l’assemblée générale de l’ONU en 1973, renforçant sa stature internationale.

A la même époque, l’AS Vita Club remportait la Coupe des champions africains 1973 tandis que les Léopards (l’équipe nationale) s’imposait en finale de la CAN 1974 face à la Zambie. Tous les espoirs étaient dès lors permis en vue du Mondial en Allemagne, pour lequel le Zaïre s’était qualifié. « L’authenticité » semblait avoir fait la preuve de son efficacité, la « zaïrianisation » de la société semblait trouver son plus complet épanouissement dans la cohésion des Léopards, pourtant originaires d’ethnies antagonistes et ne parlant pas toujours le même idiome.

Mobutu à la tribune de l’ONU.

Sorcellerie et primes impayées minent le moral des Léopards

Une fois la qualification pour la Coupe du monde acquise, Mobutu offrit à chaque joueur un emploi de complaisance dans l’administration, le MPR ou les entreprises publiques, une automobile et une maison. De plus, pour que les joueurs soient équipés convenablement, le MPR décida de lever un nouvel impôt. Décision qui aurait pu être bien accueillie par la population si elle n’avait pas été émaillée d’incompréhension et d’incidents. En effet, d’une part, les Zaïrois étaient convaincus que le pays connaissait une exceptionnelle période de prospérité et s’interrogèrent donc sur la nécessité de la contribution destinée aux footballeurs. D’autre part, la collecte tourna mal puisque les agents chargés du recouvrement en profitèrent pour se servir dans les biens des villageois. Les plaintes des villageois étant ignorées par Kinshasa, « les vieux eurent alors recours à certains pouvoirs appartenant au monde invisible pour maudire les Léopards. » En effet, comme le rappelle Michael Schatzberg, « bien des Africains comprennent la sorcellerie comme un mode de causalité parce qu’ils sont persuadés que de sombres forces influencent souvent de manière décisive les événements quotidiens, tels les matchs de football, ainsi que ceux de la haute politique. »

Les souhaits de ces « vieux » furent exaucés puisque le Zaïre repartit d’Allemagne, après un mois de préparation en Suisse, avec un bilan catastrophique : aucun but marqué et 14 buts encaissés en à peine trois matchs.

Première équipe d’Afrique subsaharienne à participer à la Coupe du monde de la FIFA, et bien que conduite par le Yougoslave Blagoja Vidinic (qui avait sélectionné l’équipe du Maroc pour la Coupe du monde 1970) et composée d’éléments de valeur (comme le milieu Emmanuel Kakoko, dit « Dieu du ballon », ou le défenseur Raymond Bwanga, Ballon d’or africain 1973), la sélection zaïroise fut aussi à l’origine d’une des pires prestations de la compétition.

Cette déroute, à l’époque mise sur le compte de la naïveté et de l’immaturité quasi-congénitales des Africains, semblait confirmer l’avis donné par France Football deux jours avant le début du Mondial : « En Coupe du monde, l’Afrique ne bénéficie que d’une seule place. On en revendique plus, mais à quoi cela peut-il servir dans une manifestation où elle a pour l’instant des difficultés à s’imposer ? »

En réalité, en plus d’une déstabilisation orchestrée par la sorcellerie dont les effets réels demandent encore à être évalués, les Léopards se désolidarisèrent uniquement lors du deuxième match face à la Yougoslavie. En effet, lors du premier match les Zaïrois tinrent le choc à défaut de mettre réellement en danger les Ecossais (0-2). Mais à la suite de cette défaite, les « primes de participation » promises aux joueurs ne furent pas versées. Ceux-ci décidèrent alors de se mettre en grève pour la confrontation face aux Yougoslaves (0-9). Dans le troisième match, ils furent tout sauf ridicules face aux tenants du titre (0-3).

Défaite zaïroise, défaite mobutiste. La politique sportive voulue par le dictateur s’achevait dans une énorme humiliation qui retomba d’abord sur les malheureux joueurs. A l’image d’un Barbosa, gardien de but du Brésil en 1950, les Léopards furent mis à l’Index par l’Etat et la société zaïrois.

Et Paul Dietschy de conclure : « le ballon rond peut aussi être vue comme une parabole du mobutisme. S’il illustra parfaitement le redressement du pays à partir de 1967-1968, puis un certain rayonnement international obtenu brièvement dans les années 1973-1974, la désastreuse campagne d’Allemagne des Léopards coïncida avec les premiers signes d’une crise qui transforma l’utopie zaïroise en cauchemar et mina progressivement le pouvoir de Mobutu. Certes, le « guide de la révolution » put encore mettre le sport au service de l’authenticité en accueillant le championnat du monde de boxe opposant Mohammed Ali à George Foreman le 30 octobre 1974, mais le football zaïrois avait atteint ses limites tant sportives que politiques. »

George Foreman, Mobutu et Mohamed Ali, à Kinshasa.

Littérature

– Paul DIETSCHY, Yvan GASTAUT et Stéphane MOURLANE, Histoire politique des coupes du monde de football, Paris, Vuibert, 2006.
– Paul DIETSCHY et David-Claude KEMO-KEIMBOU, L’Afrique et la planète football, Paris, EPA, 2010.
– Michael SCHATZBERG, « La sorcellerie comme mode de causalité politique », Politique africaine, 79, 2000.

35 réflexions sur « Léopards 1974 : Rumble in Germany »

  1. Merci Bobby. Le combat Ali-Foreman est un exemple parmi d’autres de la manipulation des masses de la part d’Ali. Se faire passer pour l’unique défenseur de la cause des noirs face à Foreman, « l’oncle Tom ». Ce qu’il fit de manière encore plus éhontée face à Frazier pendant des années. Parce qu’il avait un appareil politique derrière lui, parce qu’il présentait
    mieux.. Alors que Frazier l’avait soutenu financièrement. Alors que Smokin Joe est une victime encore plus violente de la ségrégation. Du racisme de classe et culturel.

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    1. Cette relation d’amour/haine est assez unique entre Frazier et Ali.

      Ali lui-même a toujours dit que Frazier était le seul de tous les poids lourds avec lequel il aurait pu être ami. Et qu’il l’avait aidé, etc.

      Et Frazier s’est souvent plaint -avec une triste justesse dans les arguments- de ce que lui avait dû subir ‘naturellement’ (pauvreté crasse face à un Clay issu des classes moyennes, etc) en comparaison de ce qu’Ali avait ‘choisi’ d’endurer (opinions politiques e.a).

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    1. Trois joueurs sans problème d’envergure eurocontinentale : Bonga-Bonga, « Trouet » Mokuna et Kialunda. Ces trois-là n’auraient pas dépareillé dans un club européen vainqueur de CE, tout à fait le niveau (les deux premiers, surtout).

      Mais à côté d’eux, on trouvait encore un paquet de tout bons joueurs tels Mulongo (dont la carrière fut brisée par un tackle de..Pelé!!), Muwawa à..Charleroi??, Mutshi et Lolinga au FC Liège, la « perle noire » Erumba à Anderlecht (avant Kialunda, donc)……. A Saint-Trond aussi, je me souviens avoir par exemple évoqué Lucien N’Dala..

      En fait, j’ai envie de dire qu’on peut aussi voire surtout imaginer ce qu’eurent été les résultats continentaux de la..Belgique, si elle avait daigné recourir à ces joueurs-là (c’était tout à fait possible jusqu’il y a 64 ans jour pour jour!) ; au tournant 50’s-60’s il y eut en Belgique un trou qualitatif que des Bonga-Bonga et Trouet auraient incontestablement contribué à combler – sans rien régler, toutefois, des problèmes surtout structurels de ce foot, certes.

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      1. Au niveau africain, je ne vois que l’Algerie ayant autant de joueurs rompus à la haute compétition.

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      2. Kialunda est volontiers attaché à l’Anderlecht finaliste de C3 70..mais en fait ça faisait 10 ans qu’il était en Belgique, où il débuta à l’Union.

        Sans doute la première célébrité, tant pour le Zaïre que pour la Belgique, qui fût officiellement emportée par le sida.

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      3. Salut Alex,

        en lisant le compte-tendu du match Yougoslavie – Zaïre, je suis tombé sur la description de Pierre N’Doye Mulamba, surnommé « Volvo », détenteur du plus grand nombre de buts sur une CAN. Tu as des infos ?

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      4. Hello.

        Bon, lui c’est du hors-normes.. Un ouvrage lui fut consacré, « La mort attendra », des tonnes d’hommages aussi, il gagne de plus en plus une aura de rebelle et de victime de l’autoritarisme dont je suis incapable de juger.

        Ce genre de parcours est tellement gros, WTF.. ==> A ce point glauque que je ne sais qu’en penser, pour le moins stupéfiant.

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      5. Je viens de lire deux ou trois choses sur lui et c’est effectivement glaçant…

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      6. L’Afrique du Sud, peut-être : pour les 50’s-60’s, parmi des clubs de D1 anglaise tels Charlton, Leeds..et d’autres, on trouva parfois du sacré beau monde tels Albert Johanesson (grande star des 60’s), John Hewie (WC58 avec l’..Ecosse!), Eddie Firmani (plus de 100 buts en Europe, joua aussi à la Samp’), Stuart Leary (150 buts comme pro en Angleterre, à un ratio d’environ 0,5 but/match), Bill Perry (buteur en finale de FA Cup), le triple champion (avec les Wolves) Eddie Stuart, le gardien de Forest Arthur Lightening.. « ton » Steve Mokone aussi! 😉 , Gery Francis, Viljoen………. ==> De quoi faire une sacrée bonne équipe.

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  2. Très chouette article !

    Contre l’Ecosse, la défaite n’était pas vraiment méritée, le deuxième but étant entaché d’un hors-jeu flagrant. Certains joueurs écossais ont même indiqué avoir été surpris par la qualité du Zaïre.

    Concernant le match contre la Yougoslavie, plusieurs raisons expliquent la débâcle zaïroise. Il y a évidemment cette histoire de primes non accordées aux joueurs (censées être remises en cash par les nombreux officiels proches de pouvoir qui ont fait le déplacement en Allemagne), mais également les importantes ingérences extra sportives comme celle qui a conduit Mobutu à démettre de manière cryptique l’entraîneur Vidinic (d’origine yougoslave), de peur que ce dernier ne dévoile les secrets de l’équipe à ses compatriotes ou encore la demande du ministre des sports de remplacer le gardien des Léopards après le troisième but.

    Le match contre le Brésil semble aussi avoir été « arrangé », expliquant le score de 3-0 qui satisfaisait, finalement, les deux équipes.

    Il ne faut pas oublier non plus que pour beaucoup le Zaïre a affronté la meilleure équipe de Yougoslavie de tous les temps avec une force de frappe absolument incroyable. On trouvait le fantastique trio de l’Etoile rouge Ilija Petkovic dit « Pigeon », Dragan Dzajic et Jovan Acimovic ou encore Ivica Surjak, Josip Katalinski et le prince de la Neretva : Dusan Bajevic (triple buteur dans ce match).

    La Yougoslavie ne tiendra pas ses promesse pour une sombre histoire de… primes non versées.

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    1. Oui, elle est belle cette Yougoslavie. Elle avait éliminé la Roja en qualifications. On peut ajouter le splendide gardien Maric. Oblak, un superbe milieu Slovène qui jouera quelques saisons pour le Bayern.

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      1. Un match de barrage a dû être organisé car les deux équipes ont terminé les phases de qualification avec le même nombre de points et la même différence de buts (alors que les Yougo espéraient une victoire de plus de trois buts contre les Grecs pour se qualifier, ils n’ont gagné « que » 4 à 2 à Athènes à 10 contre 11, expulsion de Bajevic à la 37ème minute).
        D’après les compte-rendus que j’ai consulté, les Yougoslaves ont dominé ce barrage de la tête et des épaules avec un but de Katalinski.

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      2. En Espagne, j’ai déjà lu des suspicions d’arrangement entre les Grecs et les Yougoslaves lors de ce match. Je ne peux certifier que c’est vrai ou juste une réaction de mauvais perdants.

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      3. Les You-You avaient besoin de battre la Grèce par 3 buts ou plus et ce n’est pas ce qui est arrivé. Je ne crois pas vraiment à un arrangement dans ce cas mais bon, tout est possible.

        En même temps, il y a des tas de légendes qui sont souvent tenaces comme celle dont tu as parlé. Il ne faut, par exemple, surtout pas parler du Yougoslavie – RFA de 1976 de l’Euro 76… Certains ex-Yougoslaves sont persuadés que les joueurs ont été corrompus.

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      4. Fetz. C’est peut-être bien en 76 que cette génération a raté son coup. 2 buts d’avance face aux Allemands, à domicile… Un qui etait très bon en 76 est le Slovène Popivoda.

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    2. Ah ben voilà : grillé sur Vidinic, j’allais le dire. Mais c’est si joliment dit, « cryptique » par exemple.. Bien vu. Vidinic était de toute façon probablement condamné au sein de son groupe, les réflexes tribaux et le goût de l’intrigue ne pouvaient que miner son autorité dans la perspective de ce match face à ses compatriotes yougos.

      C’étaient effectivement des joueurs de qualité..et cependant, fin des fins, l’idée dominante en est aujourd’hui celle de pauvres gars ne connaissant pas même les règles du jeu ; l’effet produit fut totalement inverse à celui escompté par l’africanisme de Mobutu, et durablement désastreux sur le plan symbolique : Afrique noire non rentrée dans l’Histoire du sport.

      Le désastre économique, quant à lui, menaçait dès 1970 ; la belle mécanique, plein régime entre 65 et 70, était déjà a minima enrayée……..mais la zaïrianisation fut un tsunami!

      Il faut se représenter de quoi ce fut significatif, tiens : un exemple me-relaté par un ami anversois de Kinshasa, qui y fut alors spolié de sa société.. Du jour au lendemain, un type dépourvu du moindre diplôme ou expérience se présenta dans son bureau, encadré par des militaires, exigeant tel un Etchebest qu’on lui remette les clés de la boîte… C’était réglé en 10 minutes..avec un coup de pied (au sens strict) au cul.

      Dans les trois mois, culture de la cueillette et de l’instant présent oblige : les stocks et les caisses étaient vides, l’outil de production avait été vendu ou cannibalisé.. ==> S’imaginer cela à l’échelle de tout un tissu économique……………….

      On le dit peu : Mobutu rétropédala relativement vite, les entrepreneurs spoliés connurent de pouvoir récupérer (ce qu’il restait de) leur bien.. Dès qu’il l’apprit, cet ami qui était parvenu à vivoter malgré le terrible coup subi s’encourut vers sa société, fit barrage de son corps pour empêcher la fuite du dernier camion et des dernières marchandises (des feuillards de verre) que l’autre s’empressait d’exfiltrer tant qu’il en était encore temps ; une atmosphère de fin de pillage..

      Des années plus tard, le spoliateur se présenta chez l’Anversois (des rares à être parvenu à relancer sa boîte), avec à la main un cadre de photo dont la vitre était fendue..et lui demanda s’il n’avait pas une chute pour le dépanner.. 🙂

      A noter que ces zaïrianisés, d’origine presque toujours modeste, n’ont pour ainsi dire jamais été indemnisés.. Il y eut certes des engagements en ce sens, en contrepartie de l’annulation d’une partie de la dette congolaise..mais le fonds constitué était loin, très loin de pouvoir contenter tous les lésés..et la Belgique fut (conséquemment?) loin de remuer ciel et terre pour que ces malheureux puissent récupérer quoi que ce soit.

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      1. Comment expliquer le soutien sans faille des Etats-Unis à cette époque ?

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      2. C’est au nom de l’anti-communisme que USA et ses petites mains belges menèrent au tombeau Lumumba (..dont il y a certes à redire, mais tout de même..), que fut promu Mobutu..

        Le soutien fut, longtemps, d’autant plus inconditionnel que le Congo était un foyer constant d’insurrections (Guevara y entreprend sa révolution mondiale – des histoires de fous, d’ailleurs) ou encore, je vais citer de tête Mobutu..et ce sera infaillible tant j’ai entendu cette phrase des..milliers (!) de fois : « Franz Fanon ne disait-il pas que l’Afrique a la forme d’un revolver dont la gâchette est placée au Zaïre », bref : la lutte d’influence entre les deux blocs y était d’un ordre aussi fondamental qu’impitoyable.

        C’est quand même extraordinaire, les campagnes anti-impérialistes (authenticité, zaïrianisation) qu’il put mener sans, au final, avoir dû subir tant de casse que cela à l’international………. L’Ouest a mis un temps fou à prendre ses distances avec lui, le temps que le mur tombât.. C’était la clé : son anti-communisme, le reste..

        Ceci dit, Mobutu ne cessa jamais de fricoter avec les Chinois, le Parlement à Kinshasa est un copié-collé de celui de Pékin..

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    1. C’est à peu près partout en Afrique francophone, que l’on dansa alors sur cette chanson – un « tube » continental, en fait.

      Au Grand Kalle je préfère Pepe Kalle, un peu bcp le chant du cygne de la grande scène musicale zaïroise.. c’est le début de la fin musicalement parlant : n’étaient 2-3 exceptions, tout qui a suivi ne sera plus guère qu’abatardissements, toujours plus vulgaires, de l’univers bien dépeint dans ce vidéo-clip : https://www.youtube.com/watch?v=7ptswrUTY4I

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  3. Sinon y a un paquet de passerelles entre Léopards et Ali-Foreman 74 ; en voici deux autres :

    Le stade Tata, d’abord..dont, quand j’y vivais, les souterrains abritaient encore un (très, très modeste) « musée », enfin, musée.. : ça tenait en une poignée d’affiches délavées sur un mur, c’était un certain Papa..Kalala???, qui essayait de faire vivoter cette mémoire, avec des moyens même pas qualifiables de dérisoires, rien..

    Et puis, insoupçonnable : les bus!

    Pour faire affluer autant de campagnards que possible vers Kinshasa, le temps de l’événement Ali-Foreman : Mobutu racheta et fit venir jusqu’au Zaïre la flotte de bus déployée, quelques mois plus tôt en RFA, par le comité d’organisation de la WC..74……

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  4. Merci Bobby.
    J’en profite pour poster une petite histoire en lien avec ce Zaïre. D’autres événements plus modestes que le Rumble ont lieu à Kinshasa dans les années 1970, comme la Coupe de la République du Zaïre de janvier 1976. Pour l’occasion, le ministère des sports sollicite la fédération argentine afin de trouver deux adversaires de prestige. Pour affronter le DCMP Imana et l’AS Vita (avec ses vainqueurs de la CAN 1974 Mayanga, Mutumbula et Ricky Mavuba, le père de Rio), Temperley, petit club du sud de Buenos Aires, et surtout le CA Talleres de Córdoba se portent volontaires. Y évoluent trois futurs champions du monde, José Daniel Valencia, Luis Galván et Miguel Oviedo (Luis Ludueña l’aurait probablement été sans une malheureuse blessure), entrainés par l’ancienne star de Rosario Central et de l’OGC Nice, Rubén Bravo.
    Pour les journalistes zaïrois, il est essentiel que la couverture médiatique soit à la hauteur des attentes du pouvoir. Alors les plus zélés n’hésitent pas à comparer la venue des Argentins à celle de Santos et Pelé en 1967. L’exquise technique d’El Hacha Ludueña impressionne tous les observateurs et un chroniqueur le qualifie de « Dieu du football ». Le CA Talleres gagne logiquement le trophée, les footballeurs zaïrois font bonne figure et le tournoi est un succès populaire et diplomatique.
    De retour en Argentine, plusieurs joueurs présentent des symptômes fiévreux. Avant le voyage, les médecins ont pourtant prévenu les joueurs : il est impératif de manger des aliments cuits, ne pas boire d’eau du robinet et se protéger en utilisant des bombes de répulsif contre les piqûres de moustique dans une résidence hôtelière dépourvue de climatisation. A Córdoba, Miguel Oviedo se rétablit assez rapidement grâce à un diagnostic bien établi : paludisme. A l’inverse, l’espoir de Temperley Oscar Suárez tarde à se faire soigner et quand il le fait, la relation entre ses douleurs musculaires et la tournée au Zaïre n’est pas établie. Il est d’abord question d’une hépatite virale avant que la malaria soit identifiée. Il est alors trop tard et Suárez meurt à 23 ans le 19 février 1976, triste épilogue de la tournée triomphale des joueurs argentins au pays de Mobutu.

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    1. Conseil de la meilleure doctoresse de Kinshasa, une Belgo-Uruguayenne qui avait grandi en brousse avec un lion pour animal de compagnie : avaler chaque matin et soir une cuillère à soupe de pépins de papaye.

      En termes de prévention : c’est très bien (..je dis pas que c’est la panacée, hein!). Et ça ne risque pas de rendre aveugle ni de réveiller des pulsions psychopathiques, cas de l’un ou l’autre antipaludiques connus.

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  5. Elections en France aujourd’hui? Je peine à imaginer pays plus désabusé là-dessus que la RDC/Zaïre……… On me dira les Argentins, l’un ou l’autre aussi probablement..

    Depuis l’indépendance, qu’y aura-t-on construit? Développé? Un pont à Matadi.. Une usine sidérurgique qui n’a jamais servi.. Un complexe hydroélectrique jamais abouti.. Tout le reste fut laissé à l’abandon.

    Arrivèrent la promesse des contrats chinois………….. J’en ai vu le début, vécu de bout en bout l’impensable chaos ; on ne donnait pas cher des quelques routes construites en échange de milliers de tonnes de matières premières et, de fait : ces axes sont d’ores et déjà obsolétisés..et Kinshasa est devenue une mégalopole de 15 millions d’habitants où l’on ne sait pour ainsi dire plus du tout se déplacer..sinon à pied.. D’où ce que je vous rapportais, je ne sais plus quand/où, d’une capitale politique que l’on projette désormais de reconstruire………..hors cet enfer.

    Je présume que, si nouvelle capitale il y a, on la construira non loin de l’aéroport, à distance respectable..?? ==> Cela porterait alors le nouvel emplacement non loin de l’ancien palais..mobutiste de Lansele.

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  6. En conférence de presse après le 9-0, Blagoje Vidinic a eu cette phrase mémorable « Voyez ce qui pourrait arriver si l’on suivait les méthodes de mon pays » 🙂 Il avait déjà rapatrié biens et famille avant la Coupe du Monde.

    Pour ceux qui aiment la BD je recommande « Mobutu dans l’espace ».

    Pour ceux qui aiment l’histoire je suggère « Mobutu roi du Zaïre », documentaire de 1999
    https://www.youtube.com/watch?v=Y58CZeDymN0

    Il reste de cette épopée l’un des maillots les plus magnifiques de l’histoire de la sape footballistique 🙂

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      1. Cette vidéo me donne toujours autant la pèche, m’en lasserai jamais..

        Me moquer? Nein! : Bongeli a bien raison de parler de « petites folies » créatrices, et au final ce n’est pas pire que ce à quoi avaient abouti ces escrocs allemands, avec de tout autres moyens..

        https://www.youtube.com/watch?v=_5pJpd9Vi_U

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      2. Ah non, c’était bien la V, je m’y perds. De toute façon peu importe, même ces projets spatiaux, I III ou tchic-tchac-tchouc, sont au fond raccord avec le sujet, c’est toujours le même fond de pensée qui est à la manoeuvre derrière : une grande pulsion émancipatrice, s’affirmer sur la scène mondiale, l’idée de locomotive panafricaniste…….. ==> Il en reste quelque chose, encore et toujours.. C’est plus fort qu’eux….et pourquoi pas?

        Pour recentrer sur l’article, 74 fut à tous égards un échec symbolique en technicolors, non moins qu’un point de bascule que ce coin du monde est loin d’avoir fini de payer. Et cependant Mobutu a plutôt réussi sur un point, une gageure pourtant : avoir donné vie à l’idée d’une nation congolaise (zaïroise)………dont il subsiste miraculeusement quelque chose, ces gens issus de quelque 400-500 ethnies sont plus patriotes qu’on ne croirait.. On n’a pas fini de parler du Congo.

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