A l’en croire, le vainqueur de la Coupe du monde 1954 n’était encore qu’un garnement à culottes courtes quand, en 1909 et pour l’éternité, il découvrit celui qui deviendrait son idole de ballon rond, l’attaquant Gottfried Fuchs.
A cette occasion, le goleador du Karlsruher FV avait tant marqué encore la mémoire collective, en inscrivant face à Mannheim les deux buts de son équipe, qu’Herberger en confierait plus d’un demi-siècle plus tard, comme un converti traitant avec ferveur d’une expérience initiatique : « Jamais – je dis bien jamais, jamais, jamais! – je ne pourrai oublier ce match-là de ma vie ! »
Fuchs, né en 1889 à Karlsruhe, était de fait l’un des meilleurs footballeurs de son époque. Et ainsi lors des Jeux olympiques de 1912 à Stockholm, avait-il par exemple réussi, sous le maillot du Kaiser, un exploit qui ne serait longtemps plus jamais accompli dans la vaste et merveilleuse Histoire du ballon rond : 10 buts inscrits dans une rencontre internationale, lors de la victoire par 16 buts à 0 contre l’équipe impériale de Russie !
Et cependant, à compter de 1933 et de l’accession au pouvoir du national-socialisme, la Fédération Allemande de Football (DFB) entreprendrait-elle radicalement d’effacer, de ses encombrantes tablettes, le nom de l’alors plus grand buteur de son Histoire… car l’élégant goleador Gottfried Fuchs, loin des canons raciaux du régime hitlérien, était Juif…
Reconverti avec succès dans le négoce du bois, après avoir dû ranger ses crampons, Fuchs serait même contraint à l’exil en 1937, et s’installerait donc via la Suisse et la France au Canada, où il se ferait désormais appeler Godfrey E. Fochs.
Certes le nom de Fuchs réapparaîtrait-il un jour, parmi les statistiques de la DFB, sitôt tombé le Troisième Reich… et cependant les pontes de la DFB de veiller scrupuleusement, jusqu’aux années 1970, à ce que rien ne transpire, jamais ! de cet infâme destin qu’elle lui avait réservé – et d’une certaine manière : entendait bien encore lui garder.
Herberger, entre-temps, avait quelque peu grandi depuis la révélation reçue un soir de 1909… Et « juste » parmi les complaisants et complices, et artisan subtil du « Miracle de Berne » de 1954 : avait entrepris dès 1955, au soir du premier match livré par l’Allemagne sur le sol russe depuis la capitulation, de correspondre avec son idole d’enfance, l’attaquant juif Gottfried Fuchs…
A cette première carte qu’enverrait donc Herberger, lequel s’était fait fort de la faire signer par l’ensemble des joueurs de l’équipe nationale d’Allemagne, Fuchs répondrait aussitôt avec affection : « Vous ne pouvez vous imaginer, Monsieur Herberger, à quel point votre lettre, si simple et chaleureuse, m’a infiniment réjoui. »
A compter de cette prise de contact, Herberger et Fuchs s’attachèrent alors à correspondre régulièrement : et toujours avec chaleur, et parfois même avec émotion. Et ainsi par exemple de ces vœux de Noël 1965, qui verront Herberger joindre, à l’aimable « intention d’apporter un peu de joie », une photo de la sélection allemande qui, en 1912, l’avait emporté par 16 buts à rien contre l’équipe de Russie, et avait fait entrer l’Allemand Gottfried Fuchs dans l’éternité…
Témoignages possibles de l’amitié d’instinct, élémentaire, qui quelquefois peut lier deux hommes, ces échanges se concluaient toujours, chez Herberger et comme un bel espoir autant qu’un doux regret, par le souhait que lui soit donné un jour, si le bon Dieu y consentait, d’enfin revoir l’idole de son enfance : et source de son art, et héros malmené…
Or cette occasion de sembler se présenter quand, en 1972, la Fédération Allemande de Football convint, avec ses homologues soviétiques, de la tenue d’un match amical entre les deux anciens ennemis, en vue d’inaugurer le tout frais stade olympique de Munich… Débordant d’un fol enthousiasme, et fort de l’aura éternelle gagnée en 1954, Herberger reprendrait alors sa plume, mais pour proposer cette fois au vice-président de la DFB Hermann Neuberger, architecte des cinq Coupes du monde à venir, que la fédération convie à ses frais l’exilé Gottfried Fuchs, de sorte qu’il pût assister à la rencontre depuis les ors et strapontins de la tribune d’honneur.
Cette initiative, affirmait Herberger, « ne contribuerait pas seulement à réparer, tant que se pourrait, l’injustice délibérément causée jadis à l’homme et au footballeur : elle était susceptible, aussi, de pouvoir rencontrer un écho favorable dans toute l’Allemagne » ! Et Herberger de conclure sa missive en y exprimant l’espoir d’une réponse favorable, dans le chef des omnipotents dirigeants de la surpuissante Fédération d’Allemagne…
« L’homme de Berne », qui projetait en outre d’organiser une interview de l’idole sur les ondes de la ZDF, semblait d’ailleurs si sûr de son fait, qu’il informa aussitôt Gottfried Fuchs de son initiative, en le priant de « veiller à rester libre, coûte que coûte, à cette date ! »…
Las, la réponse réservée par la DFB à Herberger serait infiniment perfide, qui par la voix de son trésorier Hubert Claessen opposerait « une inflexion nulle, à vouloir donner suite à votre proposition » – ou encore, cette fois au nom du Présidium, qu’« une telle initiative constituerait un dangereux précédent, susceptible d’occasionner de lourdes dépenses à l’avenir »… Puis le directoire de la DFB de clore le dossier pour de bon, à l’appui de ces premières et glaciales réserves, en arguant à son tour de l’urgence qu’était de devoir maîtriser une « situation budgétaire devenue délicate. »
Les arguments, à dire vrai, étaient lamentables… Car « précédent », alors que Fuchs était, en 1972, le dernier footballeur vivant de confession juive, à avoir un jour porté le maillot d’Allemagne ?
Et cette situation budgétaire, « délicate » ?… alors que cette même DFB allouerait, sitôt l’été venu, quelque 10 000 marks à chacun des 22 joueurs allemands victorieux de l’Euro 1972, et qu’un aller-retour de Montréal à Francfort, en classe économique avec la Lufthansa, n’en coûtait encore que 1760… ?
Le directoire de la DFB comptait alors 13 membres… Deux d’entre eux, Hans Deckert et Degenhard Wolf, avaient été membres du NSDAP durant les sombres heures hitlériennes ; Neuberger même avait été officier SS… Un quatrième enfin, le Francfortois Rudolf Gramlich, qui plus tard obtiendrait la Croix Fédérale du Mérite et la Médaille d’Or d’Honneur de la DFB, avait abondamment tué de civils en Pologne après avoir intégré, dès les premiers coups de la guerre, le corps des SS « têtes de mort »… – et jusqu’en décembre 1944, malgré l’imminence de la défaite, et comme pour attester de la vigueur de ses convictions : ledit Gramlich de participer encore, au sein de l’académie SS de Bad Tölz, à un « séminaire pour officiers germaniques »… Ou que dire enfin de celui qui avait été le cerveau, et des imminents Jeux de Munich, et de la Coupe du monde 1974 !
Herberger, qui lui-même avait été membre du NSDAP, et avait d’ailleurs entraîné l’équipe du Reich à compter de 1936, serait particulièrement affecté par ce refus catégorique, qu’il ressentit comme un affront personnel… – « Une déception singulière », écrirait-il aussitôt à Fuchs comme pour s’en excuser, le 22 mars 1972, « et une preuve supplémentaire, s’il en fallait encore, qu’il n’y a rien à attendre de PERSONNE en ce bas-monde » (le mot « PERSONNE » était écrit en lettres capitales)…
Le recordman des buts en sélection allemande, cependant, n’eut jamais vent de cette mauvaise nouvelle : le Canadien Godfrey E. Fochs, né Gottfried Fuchs à Karlsruhe, s’était éteint quatre semaines plus tôt à Montréal, foudroyé par un arrêt cardiaque.
Je connaissais le nom de Fuchs et son record mais j’ignorais sa biographie. Merci pour ce brillant article. Son record été battu en 2001 :
« En match international entre équipes A, Archie Thompson devient le détenteur du record mondial de buts marqués en un seul match (13), record auparavant co-détenu par les 10 buts du Danois Sophus Nielsen (17 à 1 contre la France en 1908) et les 10 buts de l’Allemand Gottfried Fuchs (16 à 0 contre la Russie en 1912). »
« Le 11 avril 2001, l’Australie bat les Samoa américaines 31 à 0 dans un match de qualification pour la Coupe du monde 2002, et Thompson marque 13 buts, ce qui est le record actuel. »
Archie Thompson, vu au Lierse, un de mes 2-3 clubs préférés en Belgique..le plus grand des petits clubs belges!..mais disparu désormais..
Eh bien je peux te dire que ce Thompson n’était pas bien brillant, quelle misère ce joueur..
Ça me rappelle un film autrichien, le dernier d’une trilogie sur des juifs ayant fuit le nazisme. L’un revient, je crois à Vienne, dans le dernier film, et revoit certains ayant aidé au nazisme, à persécuter et spolier les juifs pour en profiter. Lorsqu’il s’offusque de ne pas les voir traduit en justice, on lui fait comprendre que beaucoup trop de personnes furent impliquées et que l’on ne peut toutes les condamner si l’on veut reconstruire un pays. Que tout le monde préfère oublier, et que s’il essaie de remuer le passé, ce sera mal vu par l’opinion publique. Une fin amère.
Un beau voyage dans le temps et une ambiance en noir et blanc presque chaleureuse. Merci Bota pour ce bon petit papier !
Alors, alors, pourquoi Herberger est-il « juste » et non pas Juste ?
De manière générale, quels furent ses liens avec le nazisme ? Et comment cela se passa-t-il, pour lui, après la guerre ?
5 minutes top chrono, je compléterai ce soir!
D’emblée confesser que ce papier souffre d’un petit souci. Mais l’histoire et ses détails sont authentiques.
Cet article fut rédigé dans la semaine même où ce pan d’Histoire était exhumé des placards du football allemand, ça date et il y eut donc du neuf entre-temps, à mesure que les historiens du football allemand semblaient se voir soudain obtenir un bon pour aborder ces sujets. Ce « permis de parler », d’investiguer (mais sans réelles coudées franches – j’y reviendrai) : il peut tenir à la disparition d’éléments-clés mais influents, à des agendas politiques aussi.. Ce qui est certain, jusqu’aux années 2000 comprises : silenzio stampa sur ces questions.
Bref : j’avais composé avec le matériel existant, sur lequel d’ailleurs il n’y a aujourd’hui encore rien à redire.
Mais il y eut donc du neuf et cependant je tenais à laisser l’article dans son état originel, de sorte de pouvoir illustrer que le récit historique est un continuel renouvellement, que rien n’en est jamais arrêté. Bref.
L’apport le plus intéressant entre-temps produit, c’est que l’idée de faire venir et honorer Fuchs en 72 n’était pas du fait de Herberger, mais d’un tiers..sur lequel je reviendrai ce soir, quand j’en aurai le temps.
« Juste »? Rien à voir avec les « Justes parmi les nations », Herberger n’eut rien d’un résistant ni sauveur d’opprimés. La combinaison de ce mot et de ces guillemets n’entendait que signifier l’ambiguïté de ces années, personnages.. Pas de sang sur les mains, des lâchetés et mesquineries pour devenir entraîneur de l’équipe du Reich..et au final toutefois cette disposition (à défaut donc de l’idée) à user de son statut pour réhabiliter une victime du nazisme..ce qui n’était déjà pas si mal au regard de l’obstruction pratiquée par, manifestement, bonne moitié des dirigeants du football de la RFA.
Préciser aussi, et je reste focalisé sur le football, que ce recyclage de personnages douteux n’eut pas cours qu’en RFA. En RFA, deux grands clubs durent leur destin continental à ce type de profils « paperclippés » ( =, en es années de guerre froide, nazis non-inquiétés et recyclés au bénéfice de leur opportun anti-communisme viscéral). Parmi ces grandes figures de club : le susmentionné Rudolf Gramlich..qui d’ailleurs, APRES-guerre (!), avait spolié un survivant de la Shoah pour prendre les rênes de l’Eintracht Frankfurt, avec la complicité de l’occupant US.
Le développement du grand Bayern dut également tout à ce type de personnages – le plus influent d’entre tous.
Danke schön 🙂
Magnifique histoire que je ne connaissais évidemment pas avant de te lire.
Je viens de regarder le tournoi des JO de Stockholm. Pour les équipes éliminées au 1er tour et en quarts de finale, un tournoi de consolation a été disputé dans le but d’attribuer la 5ème place de l’épreuve. C’est dans ce cadre que l’Allemagne du Kaiser torpille la Russie du Tsar, un affront de plus pour Nicky !
Magnifique, magnifique.. 😉
J’y reviendrai!, mais, autant on peut voire doit croire en la sincérité de Herberger..et autant l’on peut voire doit plus encore considérer qu’il voulut ce-faisant se servir de Fuchs..non sans être lui-même probablement plus encore instrumentalisé..
Ceci dit, concernant le rôle de l’individu Herberger dans cette histoire qui est plus que douce-amère : fait-on, et le plus souvent malgré soi, dans la vie autre chose que de « se servir » des autres pour composer avec les contingences et meutrissures de nos existences propres? Les contextes avec lesquels dut composer Herberger ne furent jamais anodins..
J’y reviendrai tard ce soir, mais tu auras compris que je n’ai pas le fin mot de l’histoire..pour peu qu’il existe bien entendu.
On peut toutefois raisonnablement prêter à Herberger, autant qu’on sache tout au plus coupable de carriérisme et d’une assez banale lâcheté sous le Troisième Reich, d’avoir intérieurement vécu quelque examen de conscience après-guerre, quant à ce qu’il eût pu..voire surtout dû faire (facile à dire) durant les années 30-40.
D’ailleurs, toi qui connais mon goût pour Borges, il me semble que j’avais initialement mis en exergue un passage de son « Deutsches Requiem », lors de la première et désormais lointaine publication de ce papier.
Cette nouvelle traitait, notamment (Borges..), des ressorts à l’oeuvre dans le comportement inflexible d’un directeur de camp de la mort – comportement d’airain, impitoyable. Cette nouvelle concluait sur la chair dudit criminel de guerre, laquelle pouvait certes trembler à la pensée/perspective de la potence..mais pas son sang, pas son esprit.. Voilà sans doute pour des Gramlich & Co – de toute façon en rien inquiétés, puisque profils jugés utiles..
Mais ce qui fut à l’oeuvre en Herberger était assurément d’une autre nature.
merci pour ce texte où je découvre plein de choses, mis à part le fait que Herberger était le coach du miracle de Berne! ça devait pas être simple d’être dans l’Allemagne post guerre mondiale!
on en parle peut être pas assez de l’accueil Allemand pour la coupe du monde 2006! je suppose qu’elle s’est réconcilier définitivement avec le monde à ce moment là!
si je peux me permettre une remarque non polémique: pas simple de savoir comment agir dans une dictature ou une guerre, oui certains deviennent des héros en se battant instantanément dans le bon camps mais la plupart d’entre nous tenterai de survivre, bon certains engagés dans la SS ne pouvaient pas dire qu’il ne savaient pas on est d’accord!
Ce qui est étonnant, c’est le peu d’expérience en tant qu’entraîneur de club des sélectionneurs Allemands champions du Monde. Heberger, Schon ou Beckenbauer. C’est un peu moins vrai pour Low mais pas plus de 8 ans à gerer un club.
Bah, pas bien compliqué : ils ne servent à rien, des pots de fleurs.
C’est Herberger qui aura défini le modèle, « l’école de Cologne », raffiné ensuite par Weisweiler..
Tout ce qui a suivi : des types qui collent au pattern.. Du reste, pourquoi en changer : il marche..et a même fini par avoir, à l’usure, la peau du petit-jeu à la française des Batteux ou Hidalgo en s’y substituant!
Faut voir ce que les joueurs, de structure-club en structure-fédé, auront dit des Schöne, Derwall, Beckenbauer & Co, je cite le genre de propos le plus redondants : « des types juste bons à apporter les cartes pour jouer à table », ils n’avaient pour ainsi dire (les exceptions sont rarissimes) aucun crédit parmi leur cheptel-joueurs!
Bota
Haha. Pauvres sélectionneurs Allemands. Je suis vraiment pas spécialiste des coachs ni des apports stratégiques dans ce sport mais le petit portrait que tu fais d’eux n’est pas glorieux!
Pour les années 60-80, ce portrait est absolument fidèle.
2-3 apports cosmétiques par la suite, mais dans l’absolu c’est un football qui ronronne, clairement rétif au changement. Arbeit und Disziplin + restez groupir.
Encore un article de Luftwaffe …
Enfin, de haut vol
Merci Bota
Luftwaffe.. Marrant que tu écrives ça..
J’évoquais l’Eintracht Frankfurt.. Ce fut le parangon de l’hypocrisie post-war, et l’archétype assurément du soft-power exercé via le football ouest-allemand par le tuteur US. En quelques mots..
Après-guerre, nombre de clubs ouest-allemands sont radicalement restructurés, officiellement pour faire table rase du passé (ils avaient tour à tour été instrumentalisés par la gauche, les communistes, le NSDAP..), et toujours officiellement veiller surtout à ce que la moindre idéologie nazi/nostalnazie ne refasse surface via les choses du football. Je cite (traduction grossière) un passage de l’acte fondateur de l’Eintracht post-war :
« L’association justifiera la confiance qui lui est accordée par une attitude d’ouverture et veillera à l’éducation physique, mentale et morale de ses membres. De cette façon, ils seront politiquement et idéologiquement tolérants, libres de préjugés sociaux et de folie raciale, libérés de l’exercice et de l’uniforme, et développeront leur vie de club dans la camaraderie (*) et la volonté d’aider. »
(* « Camaraderie »/ »Kameradschaft », j’en profite : ce fut le leitmotiv accolé à puis véhiculé par la Mannschaft d’après-guerre, celle de Herberger donc, car des rares concepts qui n’avaient été mobilisés par la propagande nazi, et jugé suffisamment neutre et fédérateur que pour reconstruire moralement le pan occidental de l’Allemagne post-war – Du « Kameradschaft », je peux vous dire que les Allemands de l’Ouest s’en sont bouffés jusqu’à la nausée après-guerre..et encore ne fut-ce le pire dans ce qu’ils subirent de reconditionnement mental!).
Hypocrisie? Le club nouvellement institué fut confié à un juif allemand qui était parvenu à se cacher sous le nazisme, Emmanuel Rotshild (rien à voir de prime abord avec l’illustre famille). Il reconstruisit patiemment le club, avec la bienveillance US..avant d’en être évincé par Gramlich, criminel de guerre donc..et ce encore parce que le tuteur US en avait décidé ainsi. Je rappelle la déclaration d’intention plus haut : « (les membres de l’Eintracht) seront politiquement et idéologiquement tolérants, libres de préjugés sociaux et de folie raciale, libérés de l’exercice et de l’uniforme », no more comment, lol.
A Francfort, hub de la politique (et de la logistique) de l’occupation US, Gramlich jouira d’avantages anti-concurrentiels hors-normes pour développer le club, club alors élu du soft-power US donc.. et le moindre de ces soutiens ne fut certainement pas celui de la compagnie aérienne PANAM, alors bras armé diplomatique et commercial de l’impérialisme post-war US (une littérature plus qu’abondante existe sur le sujet), quand elle n’apportait tout bonnement pas son soutien direct aux opérations de renseignement de la CIA.
En bref : financements occultes, mise gracieuse des avions de la PANAM à disposition du club de Gramlich, campagnes de presse mêlant succès de l’Eintracht à la PANAM, histoire de rendre sympathique une présence US..qui depuis lors ne s’est jamais estompée (et, c’est d’actualité : malheur à l’Allemagne qui voudrait trop ostensiblement retrouver sa souveraineté..).. Cf. ce cliché par exemple, « La PANAM salue l’Eintracht, Champion d’Allemagne (!!! – pas RFA hein, Allemagne!) 1959 » :
https://ci3.googleusercontent.com/mail-img-att/AFCqZUSYveEUAR7fR49KQhtRUK7-ENoGoDcd9yLKmJX3_KIUTrMIuNeOTnM1U6qPpeA08GfcZhZ36aEqWufCLBHurM8O668GZU_jBTqdDx3b-sxI8BapLidH8b9Qk_y5jUl1G1gI9J3K_sa4huvE3hI4GLpRXxTvT_xcQqOrsb2-uifCaZ_8_IiO-BYhHRwpWSStq-_BWCoRu7oAznyToPbKKYMPv4tABUpX79yNc7tfsbovNDd5Zg-pciJprqom_9aZGUb5iKqiSmuIUh4zNyEOpS-r7B5SE00Q8u5KdOI3P8Abmkx6TK9YtXdKXs6yTYvvWPzlYjBK8Au4d92vha0wiri-Ls6PLCpeCRQXfCPnlj4fJT9e1TMnvQP-m8pBM0USTxXGAtmzdIsl5kOdboVF19cAOcot046M3ZWbIb8cvf2f1ZgT7Tv-hvuuTYRQH6NNYNw64pLIrrGAffzbbCBvSIXfmzwdYEmAfssXAP2Sf0C-9MfRl7-AiGXFZOOb03MBiUj8H6FteD3DMQVRPYcXzpoFUhmh7z-emp96lqSSpvusRR2u_rwaKxD3BP-8a8IKwH4LxU8knTwwMHpoD4XHvOozNdDrs-_uTBEr5R7o9vXFhBPufsyn1VI5royft3rBMFHisYJaRTH_n98iyrHC4YeEg2Aff1ce6xmNyzIgIx8g8uzqE_cO-0UO7mPekE37whXY7ZwVRvIklU0DS9wumj5qWodAL1KcsG80HT10a2i3DQMbLa5B0g0FwbRI7gEuKYbAUVvsCqGGwxPVJxXFWcDI0bFIYv6yWUx_B3AExAkqhHMKeoSIb6ntqY7QrDUKaJkFTupQbG42nXaiCrGBJXue_iY02z1hdBLaHI7G-UQ2surzW05ggHtU_H9ldR5jzbVG23B1ASKFZz5UIIXHl7dJC3HKCeAqyIoMOlDyRgxyAyGH_AVkl_IzFdVYEog-Pg=s0-l75-ft
Ou en 1957, quand le club fut le théâtre d’un festival musical faisant l’apologie de la culture et de l’Histoire US, etc etc.., bref..
Cet Eintracht dopé au soft-power US ira en finale de C1..puis rentrera dans le rang.. Pas grave : le Bayern prendra presque aussitôt la relève………………mais puissance dix!
Ca marche?
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Merci Bota, j’attendais ton post.
Dans ce que tu évoques, le soutien US a quelques clubs de RFA en faisant fi du passé de leurs dirigeants (cela vaut pour bien d’autres domaines), n’y a-t-il pas déjà la volonté de concurrencer la RDA et son modèle sportif, certes encore naissant dans les années 50, mais déjà bien structuré ? Une manière de déplacer la rivalité née de la guerre froide sur d’autres fronts, ceux qui touchent à la fierté nationale. Et puisque le foot est un formidable levier via son ancrage populaire, pourquoi ne pas l’exploiter ? Bon je sors un peu du sujet…
Tu n’en sors pas : tu es en plein dedans.
NB : Pas qu’en RFA…………
Jawolh, Bota
Çà marche … J’ignorais ce que tu dis
Pour moi, l’Entracht Frankfurt, c’était Andreas Möller
Pour moi plutôt Cha-Bum 🙂
Il y a les dirigeants de clubs, les coulisses, les instrumentalisations et intérêts peu avouables, les méthodes..
Et puis, ne jamais l’oublier : il y a le jeu aussi.
Ne considérer que l’un, c’est prêter le flanc à être un idiot utile.
Ne considérer que l’autre : c’est pour finir dégoûté de ce jeu si beau..
Je crois qu’il faut essayer de concilier les deux.
Et, concernant le cas allemand, je ne saurais être plus synthétique qu’à ce paragraphe extrait d’un article que je publiai jadis sur le site d’un ami :
« (…) Rien de bien neuf, toutefois, pour une Allemagne qui, au sortir de la Seconde Guerre Mondiale, fut l’objet déjà d’un prodigieux effort d’ingénérie sociale, dont témoigne par exemple l’édifiant documentaire « Overgames » du journaliste indépendant Lutz Dammbeck, illustratif de la rééducation de masse imposée alors, à ce peuple, par le biais de jeux télévisés développés par des psychiatres américains, mais exercée aussi au travers de productions cinématographiques singulièrement lénifiantes…et assurément même, pour reprendre les mots d’un historien allemand, d’un football domestique pensé alors comme une « industrie du divertissement ». »
Quelle histoire… merci Bota pour ça.
@bota : comment expliques tu le déclin d’Anderlecht ?
Problème financier , autre souci , génération moins performante ?
Il y a un peu de tout (arrêt Bosman, refonte des Coupes d’Europe – refonte pilotée par Anderlecht!!!)..mais la Chute du Mur fut un facteur décisif les concernant, ce fut probablement même, hors-Allemagne, le cas le plus proche de celui du Bayern (Cf. mes commentaires plus haut, pour voir où je veux en venir).
Rien que se pencher sur le pedigree des grands décideurs qui gravitèrent autour de ce club, d’où procéda pour d’aucuns leur fortune, est plus qu’assez parlant : Roosens, VandenStock, Davignon (quel CV..), VandenBoeynants.. Mais je préfère ne pas trop aborder cela ici.
Bref : le vecteur premier du développement WTF de ce club, après-guerre (parmi d’autres développements hum-hum), tenait à la promotion aux forceps d’un club aux valeurs ostensiblement bourgeoises et, surtout,..anti-communistes.
Quel intérêt y avait-il à le tenir encore à bout de bras, dès lors que l’anti-communisme devenait caduc?
Merci beaucoup pour ta réponse .
Comme quoi il y avait un lien entre ton histoire et Anderlecht ..ce n’était pas fait exprès mais très instructif.
Cela prouve aussi que tout l’amour porté au football avec nos souvenirs d’équipes phénoménales était un peu de poudre aux yeux
Décevant , et très triste de voir cela avec des yeux d´adultes cela enlève de la magie
Ah, moi ça ne change rien à l’admiration que je portais (et garde) pour le football magnifique déployé jadis par Anderlecht! Et puis : qu’y peuvent les joueurs?
Mais les coulisses étaient puantes, oui.. comme souvent.
Sans compter que la Belgique a changé..
Anderlecht était aussi (ils s’en réclamaient, en jouaient) le club-symbole du belgicanisme ( = Belgique à papa, unitariste)..
Pas mal d’eau a coulé sous les points depuis, le pays a changé.. Anderlecht est même tombé dans l’escarcelle d’un crypto-Flamingand ( = nationaliste flamand soft), c’est dire combien ce club a perdu de sa substance – même de son « football-champagne » de jadis, vanté des décennies durant à travers l’Europe : il ne reste absolument plus rien!, culturellement c’est désormais une coquille vide.. et la tragicomédie du Nottinghamgate leur a coûté cher en relais diplomatiques à l’UEFA (ils y furent longtemps incontournables à considérer leur statut de club co-fondateur des CE, mais désormais..).
Subsitent çà et là des soubresauts de leur vieux pouvoir d’influence/nuisance (y a pas d’autre mot, désolé), mais bon : ça tient surtout aux ultimes réflexes nerveux que pourrait avoir une poule à qui l’on vient de couper la tête..
Je pense et il le confirmera que le match Anderlecht -Australie de vienne en finale de coupe des coupes est l’un des matchs préférés de Sindelar avec son idole Resenbrik ( son autre idole est Diego mais on en reparlera ) j’ai donc été élevé footbalistiquement parlant par le club belge et Liverpool .
Merci pour toutes ces réponses
Une fierté de partager ce site avec toi , khiadia, Bobby , Verano , gooze et j’en oublie tellement ..
Austria pardon ..mon correcteur iPhone
Le match qu’il livre ce soir-là reste l’une des plus grandes prestations individuelles de l’Histoire des Coupes d’Europe, absolument maradonesque.
Mais, ce qui est le plus fort : ce n’était absolument pas un one-shot!, que du contraire : il brilla voire étincela quasi-toujours dans les grands matchs.
Ah, de la volatilité des archives sur la toile..
Cette photo de Gramlich, c’est un classique : elle apparut un jour..puis disparut durablement.. refit son apparition.. redisparut presque aussitôt…………. Désormais, c’est bon : désormais que la DFB n’eut d’autre choix que de retirer ses décorations à Gramlich, je la crois « stabilisée »..mais il faut encore chercher.
En Belgique l’équivalent en serait les « confessions » télévisuelles de VandenStock après le Nottinghamgate, dont l’espérance de vie online ne doit pas dépasser 2-3 jours.. Quoique, concernant les VandenStock : le saint-Graal se trouve dans une bibliothèque de raretés et secondes mains, sur la digue à Knokke.. Un livre qui ne paie pas de mine..mais dont certaines infos sont une bombe à retardement.
Au début je conservais les liens..mais maintenant je sauvegarde fissa la moindre photo d’intérêt (d’où le bordel indescriptible de mes documents), sur certains sujets le web est parfois, hum : facétieux.
Un regret parmi d’autres : ne jamais avoir revu la photo de Gramlich, pointant un lüger sur des civils alignés contre un mur, en Pologne.
Avant de me coucher, j’invite à visionner la vidéo postée en commentaire de la première photo (en l’espèce : demi-finale du championnat d’Allemagne opposant les deux Karlsruhe, à Cologne), Fuchs y est aisément reconnaissable..quoique avec un peu d’entraînement, certes! :
https://www.youtube.com/watch?v=t61rJmwuT5U
NB : qualité exceptionnelle pour un enregistrement-vidéo vieux de plus de..110 ans!
NB2 : ce n’est pas ce match qui ensorcela à vie Herberger, mais puisque je tenais tant que possible à rendre vie à Gottfried Fuchs.
Khiadia me rappelle un truc par la bande..
Herberger, disais-je, fut d’une assez banale lâcheté, opportuniste et carriériste aussi..
J’évoquais certaine médiocrité aussi, de sorte de pouvoir succéder à Nerz comme entraîneur du Reich, bon.. : sur le plan moral, c’était tout de même un progrès! Car une déclaration de Nerz, pour situer le prédécesseur de Herberger (auquel à ce jour je ne connais rien d’approchant)?
» Avant que le national-socialisme ne prenne le pouvoir, les étrangers et les Juifs occupaient les meilleures positions et, soutenus par la presse juive, exerçaient un pouvoir toxique. Depuis 1933 toutefois, il est devenu clair que le succès ne reste pas seulement possible pour le football allemand en dépit de la disparition de ces éléments subversifs, mais bien plutôt que c’est seulement maintenant qu’ils ont disparu de la scène que le succès devient enfin possible pour le football allemand »