La parole est la défense ! Belgique – RFA 1980

Dans un sport qui encense prioritairement les talents offensifs, petit coup de projecteurs sur les destructeurs, brutaux ou aériens. Sur leurs réussites et parfois leurs cagades. Car oui, bien défendre est un art qui mérite une plus belle exposition. Aujourd’hui Belgique – RFA 1980 à Rome. La parole est à la défense !

Après le match nul vierge, au premier tour de l’Euro 1980, qui éliminait le pays hôte, Enzo Berzot critiqua vivement le jeu « ultra défensif » de la Belgique. Son homologue, Guy Thys, non sans malice, rétorqua qu’ils avaient sciemment joué à l’italienne… Il n’est pas exagéré de considérer cette édition européenne comme pauvre en terme de jeu. Comme elle le fut au niveau de l’engouement des fans en tribunes. La Belgique a soufflé le chaud et le froid. Malmenée mais solidaire face à l’Angleterre, entreprenante et opportuniste face à l’Espagne. Elle a surpris le Continent et atteint une finale inespérée. Grâce à sa science tactique et une défense de choc où il n’y a pas de places pour les timorés. L’arrière-garde ouest-allemande n’a rien à lui envier. Schumacher, Kaltz, Stielike ou Briegel. Des noms ronflants, métaphores d’une époque où l’Allemagne partait régulièrement avec un avantage physique et psychologique sur son adversaire. Et savait en user habilement. La finale de l’Euro 1980 promet donc d’être acharnée. Elle le sera, sans atteindre un niveau d’excellence.

Premier acte

Si la Belgique de Thys reste inchangée par rapport au match face à l’Italie, la RFA de Jupp Derwall réintègre Dietz, Schuster et Allofs dans son onze de départ. L’ancien adjoint d’Helmuth Schön mise sur la vitesse et la puissance de ses deux arrières latéraux, Kaltz et Briegel, pour créer le surnombre en attaque. Stielike, le métronome du Real, évolue en libero classique, détaché de marquage, d’où partent toutes les offensives. D’entrée de jeu, Luc Millecamps démonte Hansi Müller signifiant ainsi que les Belges ne se présentaient pas en victime expiatoire. Manfred Kaltz et ses grandes enjambées testent les nerfs de Renquin. Le jeu allemand penchera d’ailleurs principalement à droite. Le milieu belge est à la traîne et ne contient pas le blondinet Schuster. Il fait ce que bon lui semble Bernd et quand Ceulemans ou Van der Elst tentent une contre-attaque, ils se cassent les dents sur un Karlheinz Förster, magnifique de classe et de force. Il n’est donc pas étonnant que les Diables Rouges cèdent dès la 10e minute. Schuster, encore lui, combine avec Klaus Allofs, lobe Gerets venu à sa rencontre, pour Hrubesch qui enchaine un superbe contrôle le poitrine qui mystifie complètement Walter Meeuws et dégaine une frappe rasante qui surprend un Pfaff trop avancé. 1-0 pour la RFA, somme toute logique.

La Belgique rate totalement sa première mi-temps. Stielike se permet quelques relances audacieuses tandis que Dietz annihile sans mal un Ceulemans des mauvais jours. Meeuws, bien que sur un fil avec la grande carcasse de Hrubesch, est le seul à montrer un peu de hargne. Une frappe sur un coup franc en deux temps, un tacle viril sur la girafe d’Hambourg mais pas de quoi changer le cours du destin. Pfaff détourne avec difficulté une frappe du gauche de Schuster, avant qu’Allofs ne trompe à nouveau la vigilance de Meeuws pour une frappe trop croisée de Rummenigge. Il est temps pour la Belgique que l’arbitre roumain Nicolae Rainea siffle la pause…

Deuxième acte

Nous ignorons le contenu du discours de Guy Thys pendant le repos mais les Belges prennent enfin la mesure de l’enjeu. René Vandereycken écrabouille la jambe de Briegel qui sort, remplacé par Cullmann. Meeuws entre définitivement dans le cerveau d’un Allofs qui traversera la finale tel un zombie tandis que le vieux Wilfried Van Moer organise plus efficacement le milieu. Kaltz et Renquin se livrent un duel désormais bien plus équilibré, qui n’empêche pas le capitaine d’Hambourg de réussir un énième centre pour la tête de Hrubesch sur laquelle Pfaff est vigilent.

Förster, désormais pressé par les Belges, perd soudainement de son élégance et assassine par derrière Ceulemans. Vandereycken rappelle à Schumacher qu’il est sur un terrain de foot quand Stielike s’empale sur Gerets. Il souffre… Conséquence ou non, encore boitillant, il est en retard sur Van der Elst qui file dangereusement seul en direction de Schumacher. Le fauche. En dehors de la surface pour l’ensemble des observateurs. Sauf pour l’arbitre qui siffle un penalty fantôme que Vandereycken s’empresse de convertir ! Égalité à 20 minutes de la fin qui réveille enfin un stade amorphe. Les Allemands, qui pensaient soulever le trophée sans trop transpirer, sentent désormais le souffle belge sur leurs nuques. Renquin intervient superbement au-devant d’Hansi Müller alors que Pfaff avait abandonné sa cage. Pfaff, toujours, envoie en corner une frappe vicieuse d’un Schuster ressorti des limbes. Alors que la possibilité d’un match d’appui fait son nid, Rummenigge botte un corner. La défense belge est apathique, personne ne s’est soucié de Hrubesch qui aligne Pfaff pour la deuxième fois. 88e minute, c’est fini…

Bilan

Soirée solitaire pour Schumacher. Isolé des débats en première période, il s’est montré sérieux sur les rares tirs cadrés belges et est pris à contre-pied sur le penalty de Vandereycken. Manfred Kaltz a réalisé une bonne première mi-temps. Volontaire, cherchant à combiner avec Müller et Schuster, il a distillé à moult reprises ses fameux centres bananes en direction de Hrubesch, sans grand succès néanmoins. Moins en vue par la suite. Idem pour Förster. Classieux et infranchissable pendant 45 minutes. Capable de petits crochets pour éliminer l’adversaire. Une belle performance pour le défenseur du Vfb Stuttgart. Bernard Dietz, le capitaine, a été d’une sobriété rare. On l’a peu vu, comme on a peu vu Ceulemans, ce qui est synonyme de contrat rempli. Stielike a démontré, en première période, pourquoi il est un joueur capable de jouer aussi bien au centre de la défense qu’au milieu. Toujours bien placé, rampe de lancement, leadership et technique, sa prestation est malgré tout entachée par sa mauvaise couverture de Van der Elst qui aboutit sur l’égalisation belge. Briegel avait, semble-t-il, des jambes mais le jeu s’est refusé à aller voir de son côté. Blessé et remplacé par Cullmann qui a lui aussi de grandes jambes mais ne s’en sert pas pour les mêmes raisons…

Côté belge, on remarque que Jean-Marie Pfaff n’était pas encore un gardien abouti. Il est malchanceux avec les rebonds sur le premier but de Hrubesch mais également mal placé. De bons arrêts sur des frappes de Schuster par la suite mais une présence aérienne suspecte sur le but victorieux de la Girafe. Renquin est allé crescendo dans cette finale. Discret, sans être réellement pris à défaut, sur la première période, il s’est montré décisif en fin de match, en sauvant son équipe et en reculant de quelques minutes la triste échéance. Eric Gerets ne manquait pas d’envie mais n’a jamais vraiment trouvé le bon tempo. Montées à contretemps, technique balbutiante, Gerets n’a pas pesé sur la rencontre. Par contre, physiquement, un véritable buffle. Demandez à Stielike. Prestation compliquée pour Millecamps. Lourd et sans anticipation, il n’a pas réussi à rassurer sa défense. Walter Meeuws enfin. Soirée contrastée pour le défenseur du Standard. Pris par une feinte sur le premier but, aux fraises sur le second, il est pourtant le défenseur belge le plus convaincant de la soirée. Meeuws a mis des coups, a frappé au but, a raté un paquet de passes. Mais a laissé ses tripes sur le terrain. Indispensable au timide renouveau belge de la seconde période.

25 réflexions sur « La parole est la défense ! Belgique – RFA 1980 »

  1. Le match n’est pas grandiose mais au moins il s’y passe des choses..et ce-faisant il sauve le tournoi, globalement très pauvre.

    Quoique, le match………. Tout le mérite en revint à la RFA, vainqueur totalement légitime, rien à redire.. A contrario : que dire du péno accordé aux Belges…

    Pfaff était loin d’être abouti en effet, qui commençait à peine à donner tort à ses (très) nombreux détracteurs au pays – et pas des moindres……..mais Goethals eut le bon goût de saluer la force de travail exceptionnelle de Pfaff, lequel partait vraiment de loin..

    A noter que, même époque : son challenger Preud’Homme était plus loin encore d’être abouti..

    Renquin, Gerets…… Pour moi Renquin était le meilleur des deux : joueur plus fin, techniquement plus sûr, meilleur défenseur, meilleur à l’anticipation.. Avec un chouia plus de sang-froid face à l’injustice, aux provocations de tous bords : c’est lui, plus que le (pourtant formidable) Lion de Rekem, qui aurait intégré l’éternité du football des 80’s.

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    1. Je t’en avais déjà parlé mais quand j’ai commencé à mater le foot, fin des années 80, je trouvais le foot belge trop soft. Surtout à partir du milieu des années 90. Et que dire des années 2000. Ce n’est pas du tout le cas de la sélection 80. Il n’y a que des gros caractères en défense. Et si tu ajoutes Venderycken ou Ceulemans, ça aboutit sur une équipe qui peut être rude quand il le faut.

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  2. Merci Khia. J’ai visionné ce match il y a quelques années (gamin, j’ai dû le voir en direct mais je n’ai aucun souvenir) et deux choses m’avaient frappé. D’abord, le positionnement de Stielike. Milieu au Real, il joue libero avec la RFA au cœur d’une défense à 5, entouré de Dietz et Förster. Schéma original pour l’époque.
    Ensuite, ce qui ressemble à une disposition frileuse ne l’est pas vraiment : les défenseurs latéraux Briegel et Kaltz ont aussi une fonction offensive. Et aux 3 attaquants viennent s’ajouter 2 milieux plutôt orientés vers l’avant, Schuster et Müller.
    Bref, ça ressemble à un 5-2-3 évolutif en 3-4-3. Plutôt audacieux !

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    1. Stielike, après avoir maté quelques matchs avec Gladbach, le Real ou sa sélection, on comprend pourquoi il est resté aussi longtemps à Madrid. Dans une époque où les places d’étrangers étaient convoitées. Qualité technique, intelligence tactique et gros caractère. C’est un véritable leader dans ces 3 équipes.

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  3. Euro très pauvre, ambiance morose… Le totonero venait d’éclater et avait emporté les illusions des tifosi en même temps que les espoirs de titre de la Nazionale avec les suspensions de Paolo Rossi (un des héros de la CM 1978) et d’autres dont le formidable Bruno Giordano de la Lazio. Les années de plomb n’étaient pas encore achevées et le hooliganisme anglais commençait à déferler.

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    1. J’avais jamais fait le rapprochement mais en effet c’est assez incroyable que l’UEFA ait maintenu l’organisation à l’Italie en pleines années de plomb. L’attentat de la gare de Bologne ne survient que quelques semaines plus tard.
      Côté hools, est-ce que les anglais avaient fait parler d’eux? Premier souvenir de leurs faits d’arme, c’est le mundial 82 avec du beau bordel du côté de Bilbao notamment (enfin je m’en souviens pas en fait, je l’ai lu dans un John King)

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      1. Au moins 2 événements en tête : la finale de C1 1975 à Paris entre Leeds et le Bayern, les abords du Parc sont saccagés par les hools, et durant l’Euro, au Comunale de Turin contre les Belges, de violentes bagarres dans les tribunes qui obligent l’arbitre à interrompre le match.

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      2. Au niveau des clubs, oui. Des précédents dès les années 70, par contre au niveau sélection, c’est plus tardif je crois.

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      3. En même temps, l’Angleterre ne dispute ni le mondial 74, ni les Euro des années 70. C’est pas au Mexique ou en Argentine, qu’ils seraient allés foutre le b… Mais probablement le phénomène devait déjà exister en fait (sans des matchs éliminatoires à l’extérieur?)
        Concernant 1982, il y aurait eu pas mal de friction avec des espagnols qui étaient largement favorables à l’Argentine dans la guerre des Malouines.

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      4. Salut à tous et a Sacha

        Pour les questions liés aux tribunes essaie d’acheter « génération supporter » de Philippe Broussard les plus de 50 ans qui s’intéressent au foot l’ont lu a mon avis.
        J’ai vu que So foot le réédite .

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      5. 2-3 impressions perso sur la question du hooliganisme dans ces années-là : 1) la dynamique du hooliganisme des clubs ne fut pas celle des sélections, pas l’impression que ce fut concomittant/synchro.. et, 2) : les Anglais sont souvent mis en avant mais, rayon hooliganisme et sélections nationales : il me semble que les..Ecossais les précédèrent et leur donnèrent le ton tout au long des 70’s – élément factuel que l’on mit toutefois volontiers sous cloche….ou alors c’était traité sous le sceau du folklore, hum..

        A l’Euro 80, oui : de solides incidents lors du match contre les Belges. Avant cela , ils s’étaient déjà illustrés lors d’un match à Luxembourg (en 77, a priori)………..mais, avant même tout cela : les trucs à relever en affrontements inter-sélections étaient plutôt le fait des Ecossais, Gallois.. ==> Bien l’impression que c’est à eux, que revint la primauté des incidents avec une sélection nationale.

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    1. Oui, K-H Förster était un defenseur formidable, intraitable et pourtant respectable, pas un tueur comme il en existait beaucoup alors. Dans mon top 10 des défenseurs des 80es.
      Après Séville 1982, les Allemands avaient mauvaise presse en France, mais lui, son image était nickel. Tapie avait réussi un sacré coup en le faisant venir à l’OM.

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      1. J’ai un vague souvenir de lui lors du sacre marseillais en 89. Il est certainement le premier gros coup de Tapie et je n’ai entendu que des louanges sur son passage au Vélodrome.

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      2. J’ai vérifié, j’avais un doute mais Allofs est bien arrivé au club un an après son compatriote. Forster est bien le premier gros « coup » de Tapie sur le mercato international en 86. L’effectif est un mélange de minots rescapés de la montée, d’honnêtes joueurs de D1 et de stars. C’est l’année où Papin débarque de Bruges mais le très gros coup c’est Giresse qu’on croyait marié à vie aux girondins. Tapie ne fait qu’emboiter le pas de Lagardère qui avait déclenché les hostilités un an plus tôt en piquant le capitaine emblématique de Nantes cette fois: Bossis. Differénce de taille, le Racing était en D2. Pour leur retour en D1, les parisiens se sont offert l’effectif sans doute le plus fort jamais vu chez promu: Olmeta, Bossis, Fernandez, Francescoli, Littbarski, Paz, Tusseau… (quoique Monaco avec Falcao, James, Moutinho, Carvalho c’était assez hllucinant aussi)

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  4. Offensivement, la paire Ceulemans-Van der Elst a été complètement étouffée par la défense allemande. Van Moer a un peu plus pesé en deuxième période mais il a manqué de soutien. Un Coeck aurait été bienvenu.

    Shuster était brillant en première mi-temps. Quel dommage cette relation contrariée avec la sélection. Enfin, Hrubesch. Vraiment précieux, comme on peut le voir avec Hambourg. Bien plus complet que l’image du mastodonte qui fout des coups de casque. Remise, placement, son physique evidemment, un poison pour une défense.

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    1. Schuster, une des révélations du tournoi, ayant su profiter de la blessure de Bonhof pour s’imposer au milieu. Ça n’a pas duré, son amour pour l’equipe nationale devait être relatif car il n’a jamais cherché à y faire carrière, même quand Derwall, avec qui il ne s’entendait pas, a cédé sa place.

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  5. Le plus beau match est Allemagne v Pays-Bas avec le triplé étincelant du gaucher Klaus Allofs (jouait à l’époque avec son frère Thomas au Fortuna Düsseldorf). Les allemands menaient 3 -0 mais se sont endormis en 2e mi-temps pour encaisser 2 buts durant les 10 dernières minutes.

    Drôle d’époque, où l’Espagne finissait dernière du groupe 2 🙂 🙂 🙂

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    1. L’Espagne était à son niveau. 7ème nation, on va dire. C’était quand même pas mal les éditions à 8 équipes. Mais impitoyable puisque qu’une 4ème place au 1er tour de l’époque est moins cotée qu’un quart aujourd’hui.

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  6. 1980 c’est peut être l’apogée de la domination allemande. En coupe UEFA, véritable baromètre de la puissance d’un championnat (et pas juste un ou deux clubs), demi-finales 100% RFA, auquel il faut ajouter Kaiserslautern éliminé en quarts par le Bayern. Et le plus drôle c’est les raclées encaissées par les 3 quarts de finaliste non allemands.
    L’année précédente c’était déjà 3 allemands sur 4 demi-finalistes.

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  7. Re bonjour à tous, je reviens tout juste de vacances !

    Entre le mondial 1990 et l’Euro 80, il faut croire que les tournois organisés en Italie ne favorisent pas le jeu offensif. Est-il possible que l’identité défensive longtemps marquée dans le football italien ait pu influencer inconsciemment les équipes sur place ?

    Et pour ma part, je préfère voir les Belges jouer en couleurs tricolores comme à l’Euro 80 plutôt que tout en rouge ; je suis assez fan des pays jouant avec les couleurs de leur drapeau 😉

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    1. J’ai bien aimé le maillot cycliste des Belges à l’Euro2016 : clin d’oeil à ses champions du monde du passé, sobriété aussi.. ==> Pas mon préféré sur le plan esthétique, mais bel équilibre à tous égards, une réussite. A titre perso : un clin d’oeil beaucoup plus heureux que le maillot Tintin..

      Mais s’il en est un qui a acquis le statut d’objet-culte parmi les fans de maillots-vintage : c’est alors notre maillot blanc de l’Euro 84, avec ses losanges aux couleurs nationales à hauteur de poumons..ce que je comprends totalement : tout à la fois sobre et original..avec même une petite touche d’avant-garde (pour l’époque) en prime, et qui n’a pas trop mal vieilli – bien mieux que toute cette vague de maillots qui, vers 1990, étaient intégralement tapissés d’effets géométriques ; tous ceux-là, je trouve que c’est la cata.

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