Petit-Pied
« Petits pieds, grands footballeurs » me disait toujours mon père, avant de se lancer dans une énumération inamovible que je connaissais évidemment par cœur : « Maradona, Baggio, Zola » ! Un ordre établi, une valeur sûre… enfin une référence fiable, base stable et socle solide sur lesquels pouvaient parfaitement être bâtis : les piliers d’une philosophie ! Quelques Zico aussi, cités ici et là… des Conti ou Rivera en veux-tu en voilà et autres Papin et Platini étalés à la pelle… Un listing de légende dans lequel j’essayais toujours courageusement, outrageusement pourrait-on presque insister, de glisser les toutes jeunes idoles de ma génération : Del Piero, Totti, Bergkamp… Comme vous devez évidemment vous en doutez, une tentative de comparaison et une recherche de cohérence qui n’avaient ici aucune chance d’aboutir… l’approche logique et le sens de l’objectivité n’étant bien sûr, rien de plus qu’un discours muet pour les oreilles sourdes d’un passionné de football ! Alors l’adolescent insolent en pleine crise identitaire, l’enfant à l’esprit naïf, insouciant… inconscient ou que sais-je encore… ce rebelle libre se pensant capable de rivaliser avec le monologue habité et le débit inimitable, imbattable même, d’un adulte méditerranéen totalement initié… cet élève là se tait immédiatement et écoute la leçon ! Un apprentissage, un enseignement donné par ce professeur de fortune, ce maître improvisé assis en bout de table et tant attaché à l’art de la narration, à la notion de transmission et de partage. Méditerranéen disais-je à l’instant ? Italien plus précisément… et même ici sicilien par-dessus le marché ! La leçon ne pouvait être alors qu’une fable, un poème… l’apologie de la nostalgie et une mauvaise foi infaillible en guise de morale finale. C’était l’époque des joueurs esthètes, la période dorée des tirs enroulés, enveloppés… des « lob coquin » et des ballons piqués… alors fatalement ici : l’ère révolue des dinosaures ! Petit-Pied ? Facile… Parfait et on ne peut mieux placé ! Un véritable coup franc à l’entrée de la surface pour nous offrir une balle déposée en pleine lucarne ! Maradona, Baggio… et Zola !
On a toujours besoin d’un plus petit que soi
Vous l’avez sans aucun doute deviné, « El Pibe de Oro » et « Il Divin Codino » laisseront aujourd’hui la vedette au « Tamburino sardo » installé ici sur la troisième marche de ce podium superbement subjectif ! « Il Tamburino sardo », littéralement « le Tambourin sarde », si l’appellation nous renvoie, sans trop de difficultés dans la traduction, vers l’un des instruments phares des fêtes de villages locales… ce surnom fait surtout référence ici au héros populaire du même nom, personnage fictif de la littérature italienne ou réel artisan de la révolution et de l’unification du pays peu importe… Le « Tamburino sardo » sera plus simplement pour nous : le tout premier « petit nom » attribué à notre grand Gianfranco Zola ! Attaquant miniature et sujet sur mesure pour me confronter à un défi de taille : réduire mes lignes et raccourcir mes textes ! Gianfranco Zola donc… Rat des champs tout droit issu des trous perdus de la Sardaigne encore sauvage des années 80. Ici une île alors désertée par l’âge d’or de l’ « Italie des miracles »… Là une destination aux plages préservées surtout de tout optimisme, « rescapées maudites » de ce tsunami d’enthousiasme ayant englouti la partie continentale du pays… Pour finir une terre surfant toujours, nostalgique et comme prisonnière d’un sablier renversé, sur les vagues infinies et les souvenirs ancrés d’une odyssée indéfinissable, une épopée spectaculaire… Un exploit extraordinaire, une exploration pour le coup clairement qualifiable d’ « extraterrestre » ou pourquoi pas ici, pour conclure: une surprise comparable à la découverte de l’Amérique ! Héroïque, homérique et incontestablement historique : le Scudetto remporté en 1970 par le Cagliari de Gigi Riva ! Magique, rêvé… un mirage bien réel et bien sûr tout aussi insoupçonné qu’inespéré. Un triomphe enfin, reflétant tout à fait l’image de la prochaine perle rare que le football sarde trouvera sur ses rivages. Rat, perle… fable et morale avions-nous plus haut… c’est exactement ça ! Gianfranco Zola : on a toujours besoin d’un plus petit que soi.
« Magic Box » !
1 mètre 68 au garrot pour notre poney pouvant tout à fait prétendre au titre d’« étalon italien », statut internationalement reconnu et ceinture adéquate pour ce challengeur de campagne ! Petit crochet ici au royaume de la boxe anglaise, parfait pour enclencher ce troisième paragraphe et bifurquer ensemble sur le plus touchant chapitre du roman de Zola… un chef-d’œuvre, un best-seller à lui seul : le passage de sa plume et sa signature ineffaçable laissée sur les pages de l’histoire de Chelsea ! Ineffaçable oui… indélébile, inoubliable ou que sais-je… et pourquoi pas ici « l’empreinte du pied de Dieu » (comme on appelle aussi la Sardaigne) ayant imprégné, redimensionné une île d’une toute autre pointure : l’Angleterre. Magistral, majestueux… à la hauteur des exigences de son altesse la Premier League, adoubé dès sa première année par les sujets de Sa Majesté et même carrément intronisé plus tard (pour l’anecdote) « officier de l’Empire britannique »… le minuscule Gianfranco est très vite devenu le favori de la reine, la mascotte des « Pubs »… la coqueluche de tout un pays ! Un « As » dissimulé outre-manche, un tour de passe-passe… une « Magic Box » ! « Magic Box » oui (comprenez « boîte magique »), « Box of tricks » parfois (« coffret à tours, à blagues… »)… casquettes, ou plutôt ici chapeaux, proches du « wizard » (« sorcier » (« crack », « expert », « génie » aussi…)) décerné par « Mister » Claudio Ranieri, ou encore du « clever » (« astucieux ») octroyé par Sir Alex Ferguson… L’unanimité comme vous le voyez, pour notre « Leprechaun italien » et son numéro 25, comme lui tout autant inattendu que légendaire ! Un joyau, un bijou de la couronne ou que sais-je encore… Enfin un joyeux nain ayant décoré à merveille les jolis jardins anglais jusqu’à mettre, à l’image de la balle dans un jeu alors très aérien : toute une culture à ses pieds ! Râteaux à la pelle, trousseau de clés et autres passe-partout de toutes parts pour notre technicien hors-pair qui aura ainsi rappelé à tous cette citation bien connue, dicton qui jadis commençait déjà dangereusement à battre de l’aile et qui aujourd’hui encore est souvent injurieusement oublié : « Si Dieu avait voulu que le football se joue dans les airs, il aurait peint le ciel en vert » !
Le Petit Poucet
Challengeur ? C’est bien le moins que l’on puisse dire… Effectivement, en quittant son coin tranquille pour s’en aller combattre sur les grands rings de ce monde, le microscopique Zola aura d’abord dû esquiver les pronostics les plus sceptiques à son sujet, principalement ceux concernant son incertaine capacité d’acclimatation au style de jeu anglais… avant d’enfin parvenir à frapper sèchement et faire tomber comme des mouches, coucher au tapis et vaincre par KO… chaque bookmakers ayant misé contre lui ! Sonné, complètement dans les cloches et se raccrochant, tant bien que mal, à une corde tendue sous l’aisselle pour éviter de s’écrouler au sol… le foot britannique de l’époque prend une sacrée claque, ou plutôt ici : une pêche en pleine poire décochée par ce puncheur de poche ! Un coup dur pour un modèle de football alors tellement « So British », aux couturiers encore fortement attachés à l’étiquette « Made in UK » d’un costume « Kick and Rush » semblant indémodable et dont la tendance penchait clairement plus : du côté d’un « crush » pour des mannequins aux mensurations de Peter Crouch plutôt que vers un quelconque coup de cœur pour notre poupée de chiffon Gianfranco ! Droites, directs et autres uppercuts percutants ? Non merci… cette culture de l’impact sera remplacée ici par de la tendresse, de la délicatesse… une finition pleine de finesse et des « assist » servit sur un plateau par ce « cameriere » en chausson (« garçon de café », comme les anglais ont souvent qualifié les travailleurs émigrés italiens). Zola alors un formidable « barista », ayant bétonné une mentalité de « ballon au sol » qui n’en était encore qu’à ses balbutiements, dans cette salle de bal anglaise aux allures de valse sans pied, vase boueuse faisant fonction de piège ou, pour conclure, véritable marre aux canards d’où les vilains petits cygnes (Waddle, Lineker (et même pourquoi pas Gascoigne)) devaient jusqu’alors s’exfiltrer afin de pouvoir exprimer au mieux : ici toute la palette de leur chorégraphie… et là les multiples tonalités de leur chant ! Avec cette « conquête technique » de l’Angleterre, campagne quasiment qualifiable de napoléonienne et effectuée qui plus est, avec bien plus de succès que le célèbre empereur français… le natif de notre sorte de « Corse ritale » s’impose donc comme l’un des pionniers de la petitesse (au sens premier du terme bien sûr), lilliputien pure souche ayant ouvert la voie à une race de joueurs dont l’Italie : raffole autant qu’elle en détient la recette secrète pour leur production à grande échelle ! Del Piero (déjà timidement croisé en prémices de ce récit (alors peut-être Totti aussi (à moindre mesure et en mettant ici (ou plutôt en montant) la barre un peu plus haut))… Montella, Di Natale, Di Vaio… Giovinco, Miccoli ou encore Cassano… concluons le casting avec quelques exemples de disciples étrangers (en restant concentrés uniquement sur les mêmes critères de sélection et de comparaison (1m80 comme limite maximale de taille ; joueurs ayant milité dans le « Campionato » ; poste d’attaquant et période « post-Zola »): Alexis Sánchez, Sergio Pellissier… Mutu, Muriel… sans oublier les derniers champions du monde en titre, le pygmée Papu Gómez et, évidement, l’incommensurable Paulo Dybala… Autant de progénitures ayant connu la plénitude d’une procession après avoir suivi les pierres semées par notre Petit Poucet, sur ce chemin de croix de la « croissance écourtée » devenu depuis une route de pèlerinage incontournable ! Une voie désormais abordable, pratiquement une promenade de santé… un sentier dégagé, agréable à emprunter et démontrant surtout, sans détour : que toute démesure est diabolique.
Napule è
« Napule è », « Naples c’est », en bon dialecte napolitain… ode à la cité parthénopéenne proposée par le splendide Pino Daniele et ondes idéales, choisies par le génial Paolo Sorrentino pour accompagner le générique de fin de sa douce caresse : « La Main de Dieu ». On y est… main de Dieu, Naples… « Marazola » et « Monaciello » ! Nous sommes en 1989 quand Eole et Neptune s’unissent afin de souffler et de faire s’échouer à Naples, la frêle esquif du tout chétif encore Gianfranco ! Directement débarqué en provenance de Sardaigne, où sa carrière vient alors fraîchement d’éclore (d’abord à Nuoro (le patelin de ses premiers pas), puis du côté de Sassari (sous la tunique de la Torres plus précisément))… notre petit pêcheur découvre ici un tout autre monde, pratiquement une nouvelle planète… celle d’une cité paraissant le temple de Poséidon, d’une civilisation visiblement invincible, insubmersible… et enfin d’un club de foot qui marche sur l’eau ! Un Napoli dépressurisé, impressionnant au possible et qui navigue à vue, aveuglé par l’amour que lui porte son équipage, son public… ses supporters, son peuple ! Un port tout entier guidé par la foi infaillible vouée à son phare, son capitaine… son prophète, bien plus qu’un simple messie bien sûr… son Dieu unique, son Diego ! Un club pour finir insaisissable, voile azur volant au dessus de tout et portée par le vent de succès aussi récents que retentissants. Ce Naples là, c’était ce tourbillon hypnotisant, ce titan évadé, cette sirène envoûtante… raz-de-marée en pleine mer tyrrhénienne, pirate tyrannique… monstre marin terrifiant ou que sais-je encore… une arche bénite par le ciel, un radeau de fortune qui médusait les plus grands vaisseaux de cet immense océan que constitue le Calcio ! Dans cette tempête de sentiments et d’émotions, pouvant tout à fait désorienter n’importe quel mortel, Zola sera immédiatement pris sous l’aile bienveillante de l’ange gardien de la ville, Saint protecteur bel et bien vivant et véritable apparition de la Vierge, ici évidemment une Madone… Maradona ! Comme vous le constatez, l’invention ambitieuse sensée rétrécir les textes (ou peut-être ici l’ambition insensée), n’a pas accouché de résultats concluants… celle-ci manifestement mâchée, sans demi-mot, par une bonne vieille machine à écrire dont les frappes (principalement ici dans cette ambiance napolitaine sulfureuse) rythment les battements d’une passion autant palpable que palpitante et se calquent, sans forcer, sur les fréquences frénétiques de l’excès ! Sous la protection de « Don Diegue » disais-je ? Et même un petit peu plus que ça… En effet, le « Dios au numéro Díez », ou « Roi Armando » (au choix), ira jusqu’à désigner lui-même, au moment de son départ douloureux du royaume de Naples… le jeune Zola comme étant carrément son digne héritier (ce dernier récupérera d’ailleurs le numéro 10 du maître)… Rien que ça ! Sacré mission, pression ou responsabilité… mais costume cependant tout sauf large pour les épaules d’un diablotin finalement du même calibre ! Bien sûr, Zola reste à des années-lumière de la gigantesque légende écrite par le génie argentin dans l’antre de San Gennaro, là n’est pas la question… l’essentiel se situe ici ailleurs, dans la symbolique des choses… Avec cette passation de pouvoir, cette transition fragile, le Napoli tourne incontestablement la plus belle page de son histoire et ses tifosi, désormais orphelins, craintifs… esseulés, soucieux mais surtout superstitieux à souhait… se tournent quant à eux vers leur prochain espoir. Une étoile pour les guider dans la nuit, alors ici facilement leur future « Star » et enfin, la nouvelle orientation vers laquelle diriger leurs prières de résurrection : « Marazola » est né !
‘A città ‘e Pulecenella
C’est donc ici, sur les bords de la côte amalfitaine, au cœur de cette Campanie encore authentique… entre baie de Naples, golfe de Sorrente… péninsules paisibles et panoramas paradisiaques… que la barque de notre article accostera et conclura son périple. Un voyage sauvage, avec pour seule et unique boussole un instinct aventurier, volage… un carnet de route aux feuilles volantes, un journal de bord insolite et désinvolte… Zola à Chelsea tout d’abord, à Naples ensuite et seulement une discrète comète, « meteore » comme on dit en Italie, une étoile filante qui, sous la forme de quelques lettres ayant furtivement traversé ce texte à la vitesse du son, a fait office de salutations rapides aux clubs de ses débuts (la Nuorese et la Torres)… Enfin, on le verra plus bas, aucune ligne ne sera consacrée à sa romance cabossée avec la « Squadra » et très peu de place sera laissée pour parler de son passage à Parme (pic se présentant pourtant comme l’un des points les plus culminants de son parcours), ou encore pour discuter du crépuscule de sa carrière : son comeback sur son île de cœur sous les couleurs de Cagliari… Notre histoire est une pelote de mots et de moments entremêlés, un tissu de souvenirs décousus, en désordre et discontinus… mais au fil cependant facile à suivre : celui du détachement ! Naples donc, produit brut du « Napule è » de Pino Daniele avions-nous juste au-dessus… et maintenant le Naples pure jus de « ‘A città ‘e Pulecenella », « la ville de Polichinelle »… chanson de Claudio Mattone ressortie des tiroirs par, entre autres, le génialissime Gigi D’Alessio… et titre ici idyllique, image parfaite et prête à marier avec le thème de notre texte ! La ville de Polichinelle oui, quelle référence ou atmosphère aurait pu prétendre mieux accompagner la conclusion de notre conte ? Peut-être un morceau de « Un giorno all’improvviso », comprenez « Un jour à l’improviste », sérénade plus contemporaine jouée par le jeune Clementino mais devenue déjà un classique, presque un hymne tant celle-ci est actuellement reprise en masse et chantée en chœur, jusque dans les rues, par des touristes tout juste atterris aux pieds du Vésuve et venus ici se joindre aux habitants afin d’observer de visu et de vivre en direct un événement unique au monde… un spectacle naturel attendu depuis maintenant plus de trente ans et prévu par les « sismologues du sport » pour ce printemps 2023 : le troisième « Scudetto » du Napoli ! Là l’éruption inévitable de la ville… Ici le séisme saisissant et sensationnel de toute forme de sensibilité… Aussi l’ébullition, le bouillonnement… la combustion, l’embrasement ou que sais-je encore… du plus grand bidonville méditerranéen, formidable favela dont l’essence même de l’âme, forcément, est fortement inflammable ! Enfin la fusion des corps… la ferveur, l’effervescence comme j’aime souvent citer… offerts par cette cité aux allures de femme fatale, aux effluves aphrodisiaques… cette fille au parfum enivrant et sa foule, que dis-je sa foule… ses enfants emprunts de folie ! Une photo de famille, une frise, une fresque… qui sera immortalisée par les flashs des journalistes du monde entier et qui fêtera ainsi son entrée au « Hall of Fame » de la fable, son flirt affranchi avec l’impossible et son histoire d’amour éternelle avec le football : sous les impacts de foudre d’un feu d’artifice infini !
Zola alors « Marazola »…
On s’éloigne du sujet ? Pas tout à fait… En effet, papoter du Napoli et de son imminent prochain « Scudetto » fait directement écho à Gianfranco Zola… notre « attaquant d’attache » était effectivement présent au sein de l’effectif campanien lors de son ultime titre de champion d’Italie (en 1990) et caracolait alors, en tête du Calcio comme en pointe de l’équipe (ici dans une « compo » qui le voyait souvent aligné aux côtés de son compère Careca)… quittant ainsi définitivement le quai de la discrétion à destination de celui, bien plus clinquant je vous l’accorde, d’un « Napoli Centrale » indescriptible et allant même, anecdote pour conclure, jusqu’à claquer l’un des buts décisif durant la course au sacre des « Azzurri »… Quatre saisons passées au centre de l’arène azuréenne, au cœur du cratère San Paolo (alors nom du stade napolitain) pour notre sorte de « Ben Stiller local » ! Iconique et décalé comme Starsky, le côté kitsch de « Radio Kiss Kiss » inclus dans le pack et des performances qui crèvent l’écran avec ici, comme pour couronner le tout, deux récompenses (une Supercoupe d’Italie et donc, un Scudetto) clairement comparables à des « Oscars du Calcio » (idée de cérémonie qui, tel un bon scenario, aurait sans aucun doute conquis le président actuel, le volcanique Aurelio De Laurentiis)… Lueur éphémère s’éteignant à l’aube d’une phase sombre, Zola sera ensuite tristement transféré à Parme durant l’été 1993, sacrifié par le boss de l’époque Corrado Ferlaino afin de renflouer les caisses d’un club frôlant alors la catastrophe financière. Parme où Zola (pour résumer rapidement comme prévenu plus haut), participera pleinement aux multiples exploits et autres nombreux titres obtenus (principalement européens) par cette petite équipe « provinciale » : tout autant épique qu’épatante ! Une sixième place au « Ballon d’Or » plus tard (en 95 très exactement), suivie d’une troisième et dernière saison chez les « Emiliani »… et voilà la « Mammà » italienne qui voit son Zola s’envoler vers la grisaille anglaise pour s’en aller poser ses ailes sur la belle pelouse de Stamford Bridge… prêt à épouser la destinée qu’on lui connaît.
… et Zola enfin « Monaciello » !
« Tamburello sardo », attaquant miniature ou encore microscopique… « Magic Box », « Ben Stiller local »… Nain de jardin, Leprechaun… perle rare et rat des champs ! Pour finir puncheur de poche, Napoléon, poney et poupée de chiffon… pionnier de la petitesse, lilliputien pure souche et j’en passe… jusqu’à l’image de Polichinelle qui elle aussi, tel un « Pinocchio napolitain », est venue pointer le bout de son nez… Nombreux auront été les casquettes enfilées par notre « Super Mario version champignons bleus », pourquoi pas ici, pour conclure : notre « Toad italien » ! Vintage, indispensable comme une Nintendo en plein âge d’or des Nineties… véritable joystick ayant marqué toute une génération et enfin « joueur en feu » façon « NBA Jam » ! C’est ça, Gianfranco Zola (toutes proportions gardées) : c’est le John Stockton du football ! Un lutin féerique, peut-être un farfadet… Un elfe facétieux, difficile à définir ou à identifier et faisant alors parfaitement office de phobie pour les défenses adverses ! Un feu follet, un farceur aux feintes et aux ficelles infinies qui, tel un faisceau de lumière, se faufilerait à travers les plus fines fissures de façades pourtant colossales… que dis-je colossales… monumentales, pharaoniques ! « Razmoket ingénieux », « Grand Schtroumpf philosophe » ou « Kirikou vaillant »… Phénomène de foire, parfait « Fantasista » (comme on dit chez nous) ou encore créature fantastique… et Zola enfin « Monaciello » ! Le « Monaciello », « Munaciello » dans le dialecte local et simplement « Petit Moine » en français… Plus qu’un personnage phare, carrément un esprit légendaire du folklore napolitain ! Patrimoine immatériel, héritage ancestral et transgénérationnel de la ville et héros de récits aussi fabuleux que fameux, ceux-ci connus de tous et depuis toujours assujettis à l’immortelle loi de la transmission orale : indispensable et irremplaçable pilier de ce château enchanté qu’est Naples ! Le « Monaciello » donc, ici stimulateur de discussion endiablées… là sujet de discorde et autres interminables débats dont les méridionaux se délectent… pour terminer ce petit bonhomme à capuche, sorte de « chaperon rouge napolitain » : est d’abord et surtout la représentation de la notion d’espoir ! L’espoir oui… celui de tomber nez à nez avec lui, d’être témoin de l’une de ses manifestations et, comme le veut la tradition, de le suivre afin qu’il nous mène à son trésor caché. Le suivre ? La transition est toute trouvée ! Vous l’avez très certainement tous compris, Zola aura avant tout servi aujourd’hui de trait d’union, de prétexte à notre texte pour parler de Naples… Ou peut-être de prétexte à Naples pour s’inviter à notre table ? Après tout peu importe… Un éclaireur, « Petit Poucet » de tout à l’heure ou trait d’union à l’instant… un témoin essentiel, un relais et enfin un pont à emprunter afin de faire passer le flambeau : de la « Main de Dieu » d’hier aux petites mains d’aujourd’hui. Et quelles petites mains ! Ou plutôt ici d’autres « Petit-Pied » : Diamanti et Quagliarella en catimini… Lavezzi aussi… deux icônes du club comme Insigne ou Mertens… jusqu’aux récents Raspadori et Kvara… Voici les dernières fourmis délivrées par mon « fournisseur de Borrowers » favori et sa formule fétiche : frais de livraison offerts et « format boîte aux lettres » garanti ! Comme les progénitures et les disciples cités plus haut (mais à la différence qu’ici les élèves sont tous napolitains (natifs ou d’adoptions, c’est identique pour Naples))… ces descendants de Zola ont eux-aussi suivi au millimètre les traces de pas laissées par notre précurseur du minimalisme, sur cette piste de cirque paradoxale qui voit les artistes courts sur pattes côtoyer, tel des acrobates en plein numéro de voltige : la grandeur et la splendeur du soleil ! « Ciao Ciao Bambino », proche d’un plus déchirant « Ciao Amore »… notre chérubin, cupidon ayant planté ses flèches sur chaque terrain où il est passé pour y faire pousser l’amour du beau jeu… terminera son œuvre en décorant le plafond de la coupole de Cagliari, chapelle alors fissurée qui a clairement connu sa Renaissance sous le pinceau de Zola… Jeudi dernier et après 33 ans d’attente, le Napoli a de nouveau été sacré champion d’Italie, l’occasion pour ce peuple fier et identitaire de ressortir des vieux tubes, disques à succès et grands classiques qui n’ont jamais cessé de tourner et qui ici : ne se feront certainement pas prier pour repartir effectuer une tournée de plusieurs décennies ! « Napule è », « ‘A città ‘e Pulecenella », avons-nous rencontré ensemble… « Un giorno all’improvviso » aussi… « Forza Napoli » ou « Forza Campione », de Nino D’Angelo, auraient été presque trop facile… Pour conclure « O sole mio » de Caruso, étendard dressé tout haut, adressé aux Dieux et qu’on ne présente plus nulle part… La chanson napolitaine étant elle-aussi inscrite au patrimoine immatériel de l’Unesco, nombreuses sont les prétendantes et d’autant plus difficile est la tâche de trouver promise pour cosigner notre papier. Pour moi ce sera « Maruzzella », plutôt la reprise proposée par Sergio Bruni, que je préfère à l’originale de Renato Carosone… Avec ça « Guagliuncella », pour retrouver ici encore l’ange blond Nino D’Angelo, la légèreté d’un été italien… les étincelles de l’adolescence et la candeur infernale de l’éternelle jeunesse de Naples ! « Maruzzella », « Guagliuncella »… Gianfranco : « Marazola » et « Monaciello ».
Toujours une belle mélodie Calcio. De Sardaigne en Campanie. Merci Calcio!
Grazie Khia amico mio!
Zola, le successeur de Diego à Naples. Dans le super parcours du PSG en 93, on garde évidemment le but des Casque d’Or de Kombouaré face au Real mais il ne faut pas oublier la superbe prestation face au Naples vieillissant de Careca ou Zola ou la tête libératrice du même Kombouaré face à Anderlecht.
Comme d’autres, pas verni en sélection le Zola. Le Mondial 94 où il prend un rouge, il me semble, le péno arrêté par Kopke à l’Euro 96.
Oui il fait parti des « sacrifiés »(ou maudits) de la Squadra »… « Comme d’autres », comme tu dis si bien, « comme beaucoup » j’ajouterai, « comme beaucoup trop » même…
Je ne sais plus pourquoi il est absent du Mondial 98, surtout qu’il offre une grande victoire à Wembley en qualifs.
Et quelle révolution pour le foot anglais! J’aime beaucoup sa fin de carrière à Cagliari aux côtés de Mauro Esposito. Grande Zola!
Oui magnifique influence, fin de carrière et, plus discrètement: reconversion. Comme on peut le voir sur le petit montage ici, ses diverses collaborations à Chelsea avec Ranieri, Mourinho ou plus récemment Sarri sont toujours appréciables, appréciées… délicieuses !
Un très grand cru de l’ami Calcio !
Puisqu’il est question de piedini dans ton intro, je suis presque surpris que tu n’aies pas cité Massimo Palanca, vieille idole calabraise, de Catanzaro certes…
Palanca n’a jamais été proche de la Nazionale, non? Un Igor Protti des années 80 quoi…
Je ne crois pas que Bearzot ait jamais pensé à lui. À son poste, il y avait Bettega…
Grazie Verano.
Oui juste, Palanca aurait tout à fait pu figurer dans mon papyrus dédié aux « Piedini » comme tu le rapporte à merveille… Je n’y ai hélas et honnêtement tout simplement pas pensé, cousin de Calabre s’étant pointé à une époque peut-être un poil trop tôt pour pouvoir prétendre à une petite place dans mes influences personnelles.
PS en parlant de Catanzaro, les « giallorossi du Sud » (quoique ce serait un titre qu’on prêterait plutôt à Lecce) devrait jouer les Playoffs pour l’ascension en Serie A, une saison seulement après leur retour en B (ce n’est pas les mieux partis mais pas les pires non plus)…
Oui, j’aimerais qu’une équipe du Sud remplace la Salernitana déjà condamnée et ce Catanzaro me plairait bien !
Perso, j’ai vraiment aimé Parme de 93 à 99. C’était offensif, avec de superbes effectifs. Le 6-0 face aux Girondins 99 qui allaient être champions de France m’a profondément marqué.
Zola, un de mes joueurs préférés.. mais le juger à l’aune de ce football anglais-là est compliqué, les defenses anglaises etaient alors à tel point open-bar.. Le moindre continental s’y balladait à l’epoque, ça n’avait rien d’un juge de paix. Ceci dit, ca n’enleve rien pour moi à la classe du bonhomme.
Peut-etre un truc sur lequel je ne suis pas d’accord : Zola, le jeu au sol et le foot anglais.. Post-war, le foot anglais n’a quasi-jamais ete monolithique dans son expression ; on l’a reduit à un long-ball / kick que beaucoup en..Angleterre rejeterent! Si bien qu’y coexisterent le kick dominant (et salvateur!) imputé par Cullis, mais aussi le push and run de Nicholson, les jeux continentaux de Clough ou Paisley, le foot total vu à Ipswich..et meme le top du top : la synthese de tout cela sous Revie, à Leeds..
Bref et ce que je veux dire: ce fut une scene bien plus vibrante et diverse qu’en Europe de l’Ouest!, ils n’eurent pas besoin des Zola Bergkamp ou Cantona pour decouvrir, apprecier ou legitimer le passing-game. Les plus belles annees d’un Gascoigne par exemple : dès les 80’s incontestablement! Et il y eut aux Iles un paquet de joueurs d’une haute finesse ou technicité, apprecies comme tels.
Pour en revenir à Zola, je ne vois rien de rien à sauver d’un Sacchi, type infatué par des ressorts qui le depasserent..mais son desamour des artistes (dont Zola) : le pompon…..